Page:La Retraite de Laguna (Plon 1891).djvu/252

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

uns les autres. Il y eut, à ce qu’il sembla alors, un moment de lutte et d’hésitation qui nous fit frissonner pour eux ; mais ils reparurent bientôt, gagnant vers l’autre bord, quoique avec une forte dérive. Nous les vîmes enfin sains et saufs aborder à la ferme : c’était une consolation et un espoir.

Le choléra cependant, loin de diminuer, sévissait avec une violence nouvelle. Le nombre des hommes attaqués allait croissant, et nous avions à craindre que, quand la rivière aurait baissé de manière à être guéable, il ne nous restât d’autre parti à prendre que d’abandonner un second groupe de moribonds à la merci d’un ennemi impitoyable : la seule supposition d’une pareille nécessité nous causait l’angoisse d’un mauvais rêve. Le corps d’artillerie tout entier achevait de se fondre. Après les plus faibles, qui avaient succombé les premiers, maintenant, au contraire, le tour des plus robustes était venu : ils étaient enlevés, comme pour en finir avec l’arme qui nous avait sauvés. Rien pourtant de ce qui pouvait les mettre dans les conditions les plus avantageuses, pour éviter ou pour combattre le mal, n’avait été négligé par