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c’était au milieu de l’enclos de Lopès ; la mission du vieux guide tirait à la fin de son entier accomplissement, et ce devoir semblait être le dernier lien qui l’attachât à la vie. Il nous avait dit, quelques heures auparavant : « Regardez ce champ de verdure sombre ; c’est mon réduit, je n’y parviendrai pas. Vous autres, sous peu, vous serez à Nioac. »

Affaibli, courbé en deux, il allait la tête penchée sur l’arçon de sa selle. Tout à coup les étriers lui échappèrent, il roula par terre, en proie au choléra. Ayant été placé sur un affût, il s’y ranima quelque peu ; et de là, il dirigeait encore la marche. Comme son beau-fils Gabriel voulait couper par un taillis : « Tournez-le, dit-il d’une voix éteinte, il est trop embarrassé de broussailles. »

À la tombée de la nuit, nous nous trouvâmes en vue de la colline au pied de laquelle est le réduit, l’ancien lieu de rassemblement des troupeaux de la ferme, que Lopès nous avait montré de loin. Le soleil déclinait ; de grands rayons orangés partaient de son disque au fond de l’horizon et rehaussaient la plus admirable perspective, si belle que notre souvenir nous la repré-