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raient, et, à peine abattues, les faisant transporter le plus loin possible, veillant lui-même à ce qu’elles fussent vigoureusement foulées sous les pieds des hommes, recouvertes de terre et comprimées, ce qui ne pouvait se faire sans beaucoup de souffrances et de grands efforts des travailleurs. Il y allait cependant pour tous de la vie, et les ordres du guide n’étaient que l’expression de la plus rigoureuse nécessité. Lopès, la grande figure pour nous dans cette scène d’incendie des grandes herbes, donnant des ordres partout, se prodiguant, se profilant en silhouette sur les flammes ou disparaissant dans leurs vides, n’était point un personnage de théâtre : nous étions perdus sans lui.

Il ne fallait pas moins que toutes les précautions prises, pour nous empêcher d’être étouffés par la fumée ; puis, quand le feu fut tout à fait sur nous, quand les feuilles et les tiges entassées sur les bords de notre aire dénudée finirent, malgré tout, par s’enflammer à leur tour, il en sortit d’immenses langues de feu qui nous effleuraient, tantôt s’élançant vers le ciel, tantôt rabattues par des courants d’air variables et rapides qui les poussaient en sifflant avec fureur