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lieux, après notre départ. Le colonel, avec ses sentiments d’homme profondément religieux, eut un regret sincère de cet abandon ; mais le nombre des cadavres était trop grand, le jour s’avançait, et la chaleur devenait accablante ; on reprit la marche.

Tel fut le combat du 11 mai, le plus important de la retraite[1]. Déjà l’affaire du 6 avait appris aux Paraguéens ce que notre monde valait ; celle-ci en confirma l’effet dans leur esprit : l’impression s’en fit sentir par l’hésitation et la mollesse qui caractérisèrent plus qu’auparavant leurs entreprises. Il nous fut aussi démontré que, outre la pratique de la guerre, il leur manquait l’inspiration tactique, celle qui sait apprécier les faits à l’instant même où ils se produisent, et deviner les obstacles pour en triompher. Leur attaque d’infanterie avait eu pour objet de mettre le désordre dans notre avant-garde, de manière à la livrer dans la première surprise à leur cavalerie. Ce plan déjoué, ils auraient dû comprendre que leur unique

  1. Il y eut plus de deux cent trente hommes tués. L’affaire avait été engagée entre deux colonnes, dont le total montait tout au plus à trois mille hommes.