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TEXTES SURREALISTES Ils sonnèrent. —- C’est bien ici, demanda l’un d’eux, que nous allons voir la femme du monde? Il ne leur fut point répondu. Une pancarte attira l’attention : Défense. Et tous trois s’écrièrent en même temps : — Pourquoi me regardez-vous? je vous prie de n’en rien faire. Sur le chemin ils virent le mausolée du quatrième amiral. Son nom brillait comme un miracle : Phillips Argenta. Les quatre escadres étrangères appareillèrent. Lorsqu’ellescontournèrent le Maëlstrom,le hautparleur fit entendre la voix du premier amiral : — Le croiseur Amiral tournera sans cesse vers la gauche, autour du Maëlstrom,dans le sens des autodromes. Il y a l’instant de l’équilibre dans une chaise, dans une prison. La lune se déroule en forme de femme du monde et regagne l’habitation à travers la cheminée. Les amiraux sont partis, mais ils ont laissé ce qu’elle voulait et elle s’en caresse. Puis elle se déroule en forme de poulpe, et regagne l’océan. Le Maëlstrom est entouré par une terrasse en béton armé, large de 13 mètres et haute de I.500 mètres, de façon que les plus grandes vagues, qui ne mesurent que 1.400mètres, ne la puissent atteindre. Trois constructionsmarquent les tiers de cette circonférence. La machinerie du tourbillon, le bar et la maison de jà concierge. La concierge est la mort. Elle est dans l’escalier. L’homme se releva. — Je suis grandi par l’épouvante, dit-il. Il me faudrait un couloir très haut, et qui descendît d’une seule traite. Or, je sais que je dois voir ici la poupée, et j’ai décidé de- nous satisfaire. Est-ce que cela se voit ? Comme je suis favorable, ce soir. On m’attend au coin de la rue, au n° 12, et tendre. Un rire qu’elle jette par les fenêtres quand elle dit qu’elle ne sait pas si elle ne se sent pas bien. Quand elle se déshabille, la mer danse du ventre derrière l’écluse et pourrit lentement ce beau tableau. Elle boit certainement plus que la raison, maisle premier venu peut aussi la boire à vau-l’eau qu’à cela ne tienne ou s’en aille. Aussitôt, elle devine son nom et le dit. Il se déshabilla par amour. — L’amour est plus fort qu’elle, cria-t -il. Davantage, il se dressa. Un effort prolongélui permit de se hausser de quelquestoisesau-dessus du sol. Ses membres, se raidissant, prirent l’apparence de’la vie. Il montait, et fut bientôt en face de la lune. Il l’immobilisa par le pouce et l’index alphabétiques, et lui demanda : — Autant t’en emporte le vent ? Paul Eluard : Le diamant qu’il ne t’a pas donné, c’est parce qu’il l’a eu à la fin de sa vie, il n’en connaissait plus la musique, il ne pouvait plus le lancer en l’air, il avait perdu l’illusion du soleil, il ne voyait plus la pierre de ta nudité, chaton de cette bague tournée vers toi. De l’arabesque qui fermait les lieux d’ivresse, la ronce douce,squelette de ton pouceet tous ces signes précurseursde l’incendie animal qui dévorera en un clin de retour de flammeta grâcede la Sainte-Claire. Dans les lieux d’ivresse, la bourrasque de palmes et de vin noir fait rage. Les figuresdentelées du jugement d’hier conserventaux journées leurs heures entr’ouvertes. Es-tu sûre, héroïne aux sens de phare, d’avoir vaincu la miséricordeet l’ombre, ces deux soeurs lavandières,prenons-les à la gorge, elles ne sont pas jolies et pour ce que nous voulorisen faire, le mondese détachera bien assez vite cle leur crinière peignant l’encens sur le bord des fontaines. Sans la menace rouge d’une épée, défaisantsa chevelure qui guide des baisers, qui montre à quel’endroit le baiser se repose,elle rit. L’ennui, sur son épaule, s’est endormi. L’ennui ne s’ennuie qu’avec elle qui rit, la téméraire, et d’un rire insensé, d’un rire clefin du jour semant sous tous les ponts des soleilsrouges,des lunes bleues, fleurs fanées d’un bouquet désenchanté. Elle est comme une grande voiture de blé et ses mains germentet nous tirent la langue.Lesroutesqu’elle traîne derrière elle sont ses animaux domestiques et ses pas majestueux leur ferment les yeux. Grandes conspiratrices, routes sans destinée, croisant l’x de mes pas hésitants, nattes gonflées de pierres ou de neige, puits légersdans l’espace, rayons de la roue des voyages,routes de briseset d’orages, routes viriles dans les champs humides, routes féminines dans les villes, ficellesd’une toupie folle, l’homme, à vous fréquenter, perd son chemin et cette vertu qui le condamne aux buts. Il dénoue sa présence,il abdique son image et rêve que les étoiles vont se guider sur lui. Comment ne pas penser à l’amour quand ( regarde une coutellerie? CLARAWALLIN L’amour, c’est la contradiction qu: appa dans le réel. Louis ARAGON