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CHAPITRE PREMIER

Historique de la Question Arménienne

Les Arméniens qui habitent le vilayet d’Erzeroum, les parties septentrionales des vilayets de Van, de Bitlis, de Diarbékir, la partie orientale du vilayet de Sivas (Arménie turque), le vilayet d’Adana et le nord du vilayet d’Alep (Cilicie), forment une population chrétienne entourée de tous côtés de populations musulmanes comprenant, en grande partie, des tribus nomades (Annexe A).

Dans ces contrées lointaines et perdues de l’Asie, les Arméniens, depuis deux mille ans, sont les représentants de la civilisation occidentale, d’abord comme chrétiens, ensuite par leur culture. Placés sous la domination ottomane depuis six siècles, leur histoire n’est qu’un long martyrologe. Beaucoup, pour conserver leur vie et leurs biens, ont dû embrasser l’islamisme (districts de Tortoum, d’Ispir, de Baïbourt, dans le vilayet d’Erzeroum, en 1820 ; de Khoyt, de Slivan dans le vilayet de Bitlis, en 1800 ; districts de Hamchène, de Yainbol et de Karadéré dans le vilayet de Trébizonde, en 1830). Un grand nombre d’entre eux a émigré en Russie (en 1830, 1856, 1878) ; à Marseille (de 1878 jusqu’en 1905) ; aux États-Unis (de 1878 jusqu’en 1912, c’est-à-dire même après la promulgation de la constitution ottomane). Mais la grande masse arménienne est restée attachée au sol natal.

C’est dans le commencement de la moitié du siècle dernier que la diplomatie européenne s’occupa d’eux, pour la première fois. Ce fut à l’occasion du soulèvement de Zeïtoun (Intervention française de 1867).

De 1867 jusqu’à la guerre russo-turque, c’est-à-dire pendant une période de dix ans, on n’entendit plus parler des Arméniens. L’Europe, bien que témoignant quelque intérêt pour les chrétiens de Turquie en général, oubliait ceux qui habitaient ses provinces orientales. Seule, la Grande-Bretagne, se tenait au courant du sort des Arméniens en Anatolie. C’était pour y faire contrepoids à l’influence russe.

Pendant la guerre russo-turque, à la suite de l’écrasement de ses armées, la Turquie, abandonnée de tous les côtés, craignit un moment que les exigences du vainqueur n’allassent jusqu’à demander l’annexion de ses vilayets asiatiques de Diarbékir et de Sivas. Elle poussa les Arméniens à réclamer, pour les provinces habitées par eux, une autonomie politique sous la souveraineté ottomane. C’était, à ses yeux, le seul moyen d’arrêter définitivement l’invasion russe