Page:La Question arménienne à la by Zohrab Krikor bpt6k870174j.pdf/38

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 36 —

aussi général ne sont pas de nature à résoudre le problème. Tant que l’extension des pouvoirs d’un gouverneur général, et de la responsabilité qui semble absolument nécessaire à l’accomplissement de ses devoirs, n’aura pas été nettement stipulée, tant que les garanties formelles n’ont pas été accordées à ce haut fonctionnaire quant à la durée de sa mission, il sera impossible de formuler une opinion sur l’efficacité des réformes proposées. Il est clair, en effet, que les gouverneurs généraux doivent avoir certaines données sur la durée de leurs fonctions, et être affranchis de l’intervention constante qui se produit, sous le régime actuel, dans les moindres détails de leur gestion administrative, et a paralysé jusqu’à présent leur action. Il est inutile d’ajouter que si cette plus grande indépendance des valis est partout désirable, elle est absolument nécessaire dans les provinces habitées par les Arméniens. Les Puissances, en un mot, convaincues de l’insuffisance des propositions du Gouvernement ottoman, pensent qu’il y a lieu de tenir un compte plus sérieux des besoins locaux constatés dans ces mêmes provinces de donner une plus grande extension aux deux grands principes d’égalité et de décentralisation, de prendre des mesures plus efficaces dans l’organisation de la police, et la protection des populations molestées par les Circassiens et les Kurdes, de définir enfin la durée et l’étendue des pouvoirs des gouverneurs généraux. À ce prix, mais à ce prix seulement, pleine satisfaction peut être donnée aux droits et aux espérances créés par l’article LXI du Traité de Berlin.

La Porte cherche, il est vrai, à diminuer la portée de cet article, en s’appuyant sur le chiffre de la population arménienne, et en général, de la population chrétienne, comparée à celui de la population totale. La proportion indiquée par la note diffère tellement de celle que donnent d’autres renseignements que les Puissances ne sauraient l’accepter comme exacte

Le tableau ci-joint de la population arménienne, dressé par les soins du Patriarcat, montre l’écart énorme qui existe entre ces différentes appréciations. La note du 5 juillet n’indique d’ailleurs que la proportion des musulmans aux chrétiens. Les Puissances désireraient avoir communication des données sur lesquelles est basé ce calcul, et elles croient indispensable de faire prendre dans le plus bref délai par une Commission impartiale dont la formation sera ultérieurement déterminée, le chiffre approximatif des musulmans et des chrétiens habitant les provinces désignées par l’article LXI.

Il faut qu’il soit bien entendu que la Porte acceptera les résultats de ce recensement opéré dans des conditions incontestables d’impartialité, et qu’elle en tiendra compte dans l’organisation des dites provinces.

Il est très probable du reste qu’en procédant sur cette base, la nécessité de donner satisfaction à toutes les exigences locales entraînera le remaniement des limites géographiques actuelles des différents vilayets.

La Porte ne saurait d’ailleurs s’autoriser des délais qu’entraîneront les opérations de recensement projeté pour ajourner l’exécution des mesures présentant un caractère d’urgence.

Il est de toute nécessité de réaliser, sans perte de temps, les réformes destinées à garantir la vie et la propriété des Arméniens ; de prendre immédiatement des mesures contre les incursions des Kurdes ; d’appliquer sans délai la nouvelle combinaison financière, de mettre provisoirement la gen-