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ANNEXE E


Note collective adressée à la Porte.


Constantinople, le 7 septembre 1880.


monsieur le ministre,

Les Soussignés ont reçu la note en date du 5 juillet dernier, par laquelle la Sublime Porte a répondu au paragraphe de leur communication du 11 juin, relatif aux améliorations et aux réformes administratives que le Gouvernement ottoman s’est engagé, par l’article LXI du Traité de Berlin, à introduire dans les provinces habitées par les Arméniens. Une étude attentive de ce document leur a prouvé que les propositions formulées par le Gouvernement ottoman ne répondent ni à l’esprit ni à la lettre de cet article. Les Puissances représentées par les Soussignés n’ignorent pas que le Gouvernement ottoman a envoyé deux Commissions dans les provinces habitées par les Arméniens ; mais elles ont des raisons de penser que ces missions n’ont abouti à aucun résultat, et la Porte, contrairement aux obligations résultant pour elle de l’article LXI, s’est abstenue de les porter à leur connaissance.

Rien ne prouve qu’une amélioration quelconque ait été introduite dans l’administration de la justice. De nombreux rapports consulaires établissent, au contraire, que la situation actuelle, au point de vue de l’indépendance des Tribunaux civils ou criminels est aussi peu satisfaisante, sinon pire, que par le passé.

En ce qui concerne la gendarmerie et la police, la note du 5 juillet affirme que la Porte a invité plusieurs officiers spéciaux à présenter des projets de réforme de ces deux services. Les Puissances n’ont pas eu connaissance de ces deux projets, et le Gouvernement ottoman n’est même pas en état d’affirmer qu’ils lui aient été présentés.

Les Soussignés ne sauraient donc admettre que la réponse de votre Excellence ait donné la moindre satisfaction aux plaintes formulées dans leur note du 11 juin. Ils se croient d’ailleurs d’autant plus autorisés à réduire à leur juste valeur les efforts tentés à ce point de vue par le Gouvernement ottoman, que la Porte, à en juger par cette même réponse, se rend évidemment un compte moins exact de la situation et des obligations que lui impose le Traité de Berlin.

Les termes mêmes dans lesquels la Sublime Porte a cru pouvoir s’expliquer sur les crimes commis, ou signalés comme ayant été commis, dans les provinces habitées par les Arméniens, prouvent qu’elle se refuse à reconnaître le degré d’anarchie qui règne dans ces provinces, et la gravité d’un état de choses, dont la prolongation entraînerait, selon toute vraisemblance, l’anéantissement des populations chrétiennes dans de vastes districts.

La note du 5 juillet ne formule aucune proposition sérieuse tendant à mettre un terme aux excès des Circassiens et des Kurdes. Il est cependant