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l’Empire. Les ambassadeurs des six grandes Puissances la signalaient dans leur note collective du 7 septembre 1880. Le Gouvernement turc, aussi bien sous le règne d’Abdul-Hamid que sous le régime constitutionnel, est resté attaché à ce système. Dans ces derniers temps, l’opinion publique turque est devenue favorable au système de décentralisation. Mais malheureusement aucun changement n’est survenu dans les idées des dirigeants turcs. La nouvelle loi sur les vilayets, malgré quelques concessions insignifiantes, faites pour tromper l’Europe, maintient toutes les règles de centralisation et ne donne aucune satisfaction aux légitimes aspirations des populations des provinces. Il n’y a rien à attendre de cette loi.

En résumé, les réformes dans les provinces arméniennes consisteraient dans l’adoption des trois mesures suivantes :

1o Nomination d’un vali européen, choisi sur l’avis des Puissances, et possédant toute la liberté d’action nécessaire ;

2o Participation des Arméniens dans une juste mesure aux jonctions publiques ;

3o Décentralisation administrative.

Ce sont là les trois conditions sine qua non auxquelles un Gouvernement, sincèrement animé du désir d’améliorer le sort des Arméniens, de même que celui des Turcs et des Kurdes qui habitent ces vilayets, ne pourrait refuser de souscrire.

La perte de la Roumélie et les excès commis sur la population musulmane ont créé chez celle-ci un sentiment de vengeance contre les chrétiens, bien compréhensible, et dont les Arméniens seront seuls à supporter les terribles explosions. Déjà en ce moment, des menaces de massacres sont répandues contre les Arméniens dans toute l’Anatolie. La nomination d’un vali européen peut, seule, arrêter le mouvement.

Un vali européen à la tête de quelques provinces ottomanes ne signifie ni « séparation », ni « autonomie » ni même « régime particulier ».

On a suggéré l’idée de garder le vali turc et de lui donner des conseillers européens. C’est une conception bâtarde qui ne peut donner aucun bon résultat. C’est le système des compétitions, des frottements et des compromis. C’est la Macédoine sous Hilmi Pacha.

On a parlé aussi de contrôle européen. Tout cela est vain. Il faut porter le remède là où se trouve le mal ou renoncer à l’espoir de le guérir. Un Européen comme chef du pouvoir ou rien. Nous pensons qu’en dehors de la solution que nous proposons, il n’y a aucune chance de voir les réformes aboutir.

En Turquie, chaque fois qu’on a parlé de réformes, la question d’exécution a été envisagée aussitôt. Toutes les fois que l’Europe a tenu sérieusement à cette exécution, elle en a déterminé les condi-