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demande du Patriarcat, majora de 3 piastres le « bédéli askéri » des Arméniens.

Cet impôt additionnel produisit 15.000 Lt payées par 50.000 contribuables arméniens. Si on évalue à 200.000 le nombre de ceux qui, ayant moins de 15 ans ou plus de 60 ans, ne sont pas assujettis à cet impôt, le nombre des Arméniens atteint 700.000, et ce chiffre doit être porté au double. En effet, dans le mazbata du budget 1296, élaboré par le Conseil des ministres et publié dans le Salnamé de 1298 (Annexe L), il est prévu, comme rendement annuel de cet impôt, la somme de 462.870 Lts, pour toute la Turquie. Le Conseil des ministres ajoute qu’en évaluant la population mâle non musulmane, dans l’Empire ottoman, au minimum à 4.000.000, le rendement annuel devrait être le double ; ce qui signifie que l’État n’arrivait pas à percevoir cet impôt de la moitié de ses sujets non musulmans.

Comme on le voit, le Conseil des ministres, dans ce calcul, estime implicitement que le nombre des personnes mâles âgées de moins de 15 ans et de plus de 60 ans, représente la moitié de la population mâle non musulmane. En calculant, sur la même base, le nombre de la population arménienne, on trouve, qu’en 1884, il dépassait 3 millions.

On ne peut pas nous objecter que nous ne tenons pas compte des massacres de 1895-1896, de ceux d’Adana, des émigrations. En évaluant le chiffre actuel des Arméniens en Turquie à 2.100.000, non seulement nous ne prenons pas en considération l’accroissement dû aux naissances pendant ces trente dernières années, mais nous faisons une réduction d’environ 900.000 sur le nombre d’avant trente ans.

Il ressort de l’analyse de la dernière statistique du Patriarcat que, dans l’Arménie turque, l’élément arménien forme environ le 39 % de la population totale, alors que l’élément turc n’en représente que le 25 %, et l’élément kurde, même réuni aux autres races, supposées ses parentes, telle que les Kizilbaches, les Zazas[1], etc., le 24, 5 %.

Au point de vue de la nationalité, les Arméniens forment donc la majorité vis-à-vis des Turcs et des Kurdes, respectivement. Le Gouvernement turc, pour démontrer que l’élément arménien est en minorité, le met en face des Turcs et des Kurdes réunis, en faisant valoir que ces derniers sont tous les deux de religion musulmane. La religion n’a rien à faire dans les questions de nationalité et le calcul fantaisiste du Gouvernement turc ne saurait être admissible.

  1. Les Zazas sont considérés, à tort, selon nous, comme des races kurdes. Les Zazas sont des Arméniens convertis à l’islamisme. On retrouve dans leur langage un grand nombre de mots arméniens, tels que : « ardjidj » (plomb), « gochgar » (cordonnier), etc.

    Leurs mœurs en témoignent aussi. Ils portent sur leur calpak le signe de croix. Dans leur famille, on fait, sur les pains préparés à la maison, le même signe. Nous pourrions multiplier ces preuves.