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Thèbes, livre sublime aux pages de granit,
Le regard te dévore et l’esprit te bénit !
Ô fille du soleil, reine, des vastes sables,
À tes pieds affermis les races périssables
Roulent sans t’ébranler de leurs flots orageux…
Pour ton éternité les siècles sont des jeux !
Ô temple lumineux, ô vivant Cosmolabe,
Heureux qui de ce livre a lu quelque syllabe !
Bienheureux qui, couché parmi les verts roseaux,
Voit le fleuve sacré mener ses grandes eaux ;
Et, l’oreille tendue aux paroles des sages,
D’un regard plein d’amour contemplant leurs visages,
Sous les cieux élargis, avec sérénité,
Adore gravement la sainte vérité !
Quand vint l’heure où ma lèvre encore inassouvie
Dut boire en frémissant à la coupe de vie,
Temple d’Isis, autel de mon mythique hymen,
Tes voiles sont tombés au devant de ma main ;
Et dans les profondeurs de ton ombre sévère
Que le profane ignore et que l’esprit révère,
Pauvre aveugle inondé de vie et de clarté,
J’ai passé du néant à l’immortalité !
Égypte vénérable, ô féconde nourrice,
Ton lait coule à doux flots sans que rien le tarisse ;
Et pourtant, de ton sein aussitôt détachés,
Combien de tes enfants au tombeau sont couchés !
Combien n’ayant que l’ombre et le doute en partage
Ont été dépouillés du céleste héritage !
Ils ont vécu, sont morts, et sans cesse à leurs yeux
Le symbole impassible a dérobé les cieux !
Ah ! si l’humble étranger épris de ta sagesse,
Mérita mieux sa part d’une telle largesse ;
Si j’ai quitté pour toi mon pays enchanteur,
Mes amours et mes dieux et mon toit protecteur,
Ah ! laisse-moi pleurer plus d’une larme amère
Sur ces peuples enfants qu’a rejetés leur mère,
Et dont l’œil n’a point lu, dans les pages du ciel,
La science et la vie et le monde éternel !


pharaon.


Je suis le Pharaon, le roi des Pyramides,
Le pasteur glorieux de cent troupeaux timides !