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Revêts-le, don jaloux, d’un large embrassement,
Allume dans son cœur un courroux consumant ;
Et, comme une autre chair qui s’unit à la sienne,
Qu’il baigne de son sang ta pourpre phénicienne !
De l’immense clameur de ses tourments sans frein,
Qu’il frappe sans relâche au firmament d’airain ;
Que les chênes noueux, rois aux vieilles années,
S’embrasent en éclats sous ses mains acharnées ;
Et, saluant d’en bas l’Olympe soucieux,
Que l’Œta flamboyant l’exhale dans les cieux !
Passions, passions ! ô robe expiatoire !
Tunique dévorante et manteau de victoire !
Passions faites chair, de vos replis brûlants
Vous étreignez ainsi les forts lutteurs aux flancs,
Et vous aiguillonnez de vos flammes cuisantes
L’universel concert de leurs douleurs puissantes !
C’est peu d’avoir planté d’une immortelle main
Douze combats sacrés aux haltes du chemin ;
C’est peu, multipliant sa souffrance infinie,
D’avoir sué pour tous la sueur du génie ;
Ô saintes passions, inextinguible ardeur,
Ô source de sanglots, ô foyer de splendeur,
Ô robe de Nessus, prison inextricable !
Votre feu les poursuit, votre poids les accable,
Et leur main convulsive, à chaque effort vainqueur,
Unit à vos lambeaux des lambeaux de leur cœur !
Passions, passions ! enivrantes tortures !
Langes divins, linceul des fortes créatures,
Gloire à vous, qui, toujours, sous notre ciel terni,
Chauffez l’autel glacé de l’amour infini !
Insondable creuset d’alchimie éternelle,
L’esprit qui défaillait retrempe en vous son aile,
Et sur la hauteur sainte où brûle votre feu,
Vous consumez un homme et vous faites un Dieu !

LES ÉPIS.


Comme autrefois Jésus, que l’archange accompagne
Au sommet lumineux de la sainte montagne,
Et qui, pâle, entrevoit de ses yeux effrayés
La terre immense et sombre étendue à ses piés ;