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lettres sur la politique extérieure

s’était essayée que dans de petites guerres, ne négligeait pas, suivant son habitude, les éléments des insurrections.

Sa fourberie, d’ailleurs, était partout complète. M. de Bismarck avait d’abord endormi le roi Guillaume, puis tout à coup il s’était écrié au milieu d’un groupe d’amis, presque publiquement : « Je l’ai conduit jusqu’au fossé, il faut qu’il saute. » La France était engagée, en cas d’alliance de l’Italie et delà Prusse contre l’Autriche, à ne pas défaire son propre ouvrage. Le seul danger pour le fourbe était que la France réussit par ses bons conseils à Vienne à obtenir la cession de la Vénétie contre des compensations pécuniaires ou autres. Il fallait agir à la cour d’Autriche contre cette possibilité un instant menaçante. M. de Bismarck fit écrire par les bons parents de Prusse à la mère de l’empereur François-Joseph, à la grande-duchesse Sophie, à plusieurs autres princes et princesses de.la cour, qu’on ne ferait pas la guerre. L’Autriche, alors tranquille, ne voulut pas céder. La grande-duchesse Sophie est morte avant d’avoir pardonné à la. cour de Prusse ce procédé bismarckien, digne de Machiavel ou de Frédéric le Grand.

Nous avons parlé de la façon dont M. de Bismarck joue des insurrections ; il est bon de rappeler ici que la Hongrie, depuis 1849, était dans l’attente du moment où elle revendiquerait ses libertés. C’était une trouvaille pour M. de Bismarck. Citons alors l’inoubliable dépêche au comte Usedom, lorsque le général La Marmora tardait trop, au gré de M. de Bismarck, à organiser l’insurrection hongroise.

« Bismarck à Usedom, 13 juillet 1866. — Insister énergiquement pour qu’on se mette en relations avec le comité hongrois ; le refus de La Marmora nous donne quelques soupçons contre l’Italie et les services qu’elle pourrait rendre’pendant la guerre. Nous voulons ouvrir les hostilités dans le courant de la semaine prochaine. Nous sommes frappés des hésitations inexplicables de l’Italie pour une alliance avec la Hongrie. Nos anxiétés sous ce rapport seraient multipliées si l’Italie voulait s’engager, .dans une guerre stérile dans le quadrilatère. »

L’armée prussienne bat l’Autriche à Sadowa. Le jour même la Presse somme l’Italie, sa complice la veille dans le projet