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un monument à paul de flotte en italie

révolution de Février. M. de Lamartine a noté dans son histoire de cette époque l’élévation de pensée et l’élégance de diction que de Flotte apportait dans ses discours. Arrêté une première fois au 15 mai, à la suite de la manifestation en faveur de la Pologne, il le fut de nouveau pendant la terrible insurrection de juin ; transporté sans jugement sur les pontons, il y resta de longs mois. Mis en liberté, son nom servit de mot de ralliement, avec ceux de Carnot et Vidal, aux Parisiens qui, dans l’élection partielle du 10 mars 1850, voulaient protester tout à la fois contre l’expédition de Rome et l’envahissement du cléricalisme, contre le déni de justice aux travailleurs et le refus de l’amnistie. Il fut élu représentant du peuple à l’Assemblée nationale législative par plus de 126 000 voix avec ses deux co-candidats. Cette élection souleva les colères de la réaction oligarchique et cléricale, colères que redoubla la nomination d’Eugène Sue par les mêmes électeurs, le mois suivant, et qui aboutirent à la mutilation du suffrage universel par la fameuse loi du 31 mai. La réaction chercha, lors de la validation des pouvoirs, à contester à de Flotte la jouissance de ses droits civils et politiques, comme ancien transporté de Juin ; mais le ministre de la justice (M. Rouher) dut déclarer que, d’après les termes mêmes de l’exposé des motifs de la loi du 27 juin 1848, la transportation était une mesure de salut public, indépendante de toute décision judiciaire, qui suspendait la liberté, mais sans toucher aux droits civils et politiques ; que M. de Flotte avait été arrêté, mais qu’il n’y avait eu contre lui aucune condamnation judiciaire, et qu’ayant été rendu à la liberté à la suite d’une instruction administrative, il était régulièrement éligible. Quelques jours après, un membre de la droite ayant cru devoir interrompre le nouveau député pour lui demander de quel côté des barricades il était en juin 1848, celui-ci répondit au milieu des applaudissements : « Vous ne le savez point et pourtant vous m’avez transporté ! Je suis ici le représentant de tous ceux que vous avez transportés sans savoir de quel côté ils étaient. » Paul de Flotte vota constamment avec la partie la plus avancée de l’Assemblée. Toutefois, sur la fin de 1851, il étonna la majorité de droite quand, après un discours empreint des sentiments les plus radicaux, il protesta contre toute idée