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les pseudopodes et le protoplasme qui entourent la capsule centrale disparaissent peu à peu ; le contenu de celle-ci se divise en une multitude de petits corps sphéroïdaux, puis la capsule se rompt et ces petits corps apparaissent sous forme de globules munies d’un filament mobile, constamment agité et qui leur sert d’appareil locomoteur. Nous retrouvons ici, par conséquent, le corps reproducteur que nous avons déjà rencontré chez les Protomyxa, les Myxastrum, les Protomonas et autres Monères. Seulement ce corps est ici pourvu d’un noyau et contient même parfois une concrétion minérale, d’apparence cristalline (fig. 4, nos 3 et 4).

Cette persistance de la forme des corps reproducteurs est importante ; nous aurons à la signaler de nouveau ; nous la verrons même se fixer et produire des organismes véritablement indépendants, les Infusoires flagellifères, origine à leur tour de types plus importants.

En somme, la reproduction des Rhizopodcs ne diffère pas d’une simple division du parent en un nombre variable d’individus nouveaux. Ceci va nous donner l’explication d’un phénomène des plus remarquables dont tous les naturalistes qui ont voulu étudier ces êtres, ont été frappés.

Les Foraminifères sont innombrables et cette épithète s’applique tout aussi bien aux formes qu’ils peuvent revêtir et que l’on serait tenté d’appeler spécifiques qu’aux individus eux-mêmes. Des naturalistes éminents ont consacré un temps considérable à l’étude de ces formes : William Carpenter en Angleterre a essayé de classer les espèces vivantes et a publié un gros volume in-4o qu’il a intitulé modestement : Introduction à l’étude des Foraminifères. En France, le savant doyen de nos géologues, M. Terquem a consacré toute une série de beaux mémoires à l’étude de ces formes fossiles. L’un et l’autre arrivent à cette conclusion qu’il est impossible de tracer une limite à la variabilité de ces formes : on peut passer de l’une à l’autre par les transitions les plus ménagées. Aussi Carpenter n’hésite-t-il pas à dire qu’il n’y a pas d’espèces parmi les Foraminifères, mais seulement des séries de formes se rattachant toutes plus ou moins à un nombre, très grand du reste, de types, reliés eux-mêmes de mille façons les uns aux autres.

Fig. 3. — RADIOLAIRES. — 1. Arachnocorys circumtexta, Hæekel. — 2. Amphilonche hoteracanta, Hæckel. — 3. Acanthometra elastica, Hæckel.

Tout récemment le professeur Hæckel, d’Iéna, a eu à examiner une riche collection de Radiolaires recueillies par le Challenger pendant son expédition de dragages. À priori, il avait demandé cent planches in-4o pour figurer les formes, fort nombreuses déjà, qu’il croyait avoir reconnues comme distinctes. Un examen plus approfondi lui a montré que ces cent planches lui permettraient tout juste de figurer les types principaux. Il existe entre ces types des formes intermédiaires en quantité infinie ; aucun caractère ne permet de les répartir en espèces malgré l’apparente régularité de leurs parties solides qui semblerait donner prise à des caractéristiques précises.

L’espèce n’existerait donc pas non plus parmi les Radiolaires.

Il suffit pour rendre compte de ces conclusions, si étranges, au premier abord de rapprocher les conditions de la reproduction des êtres inférieurs qui nous occupent, des conditions de la reproduction des êtres les plus élevés parmi les végétaux et les animaux. Là la reproduction nécessite en général le concours de deux individus différents ou tout au moins d’éléments tout différents d’un même individu. Dans l’acte de la fécondation les caractères personnels des individus tendent à se neutraliser, les caractères qui leur sont communs, les caractères spécifiques tendent à primer les autres ; aussi l’espèce se maintient avec des caractères à peu près constants et dont la limite de variation est encore à déterminer.

Mais la génération sexuée n’exclut pas chez un grand nombre d’animaux et chez la plupart des végétaux un autre mode de reproduction, dans lequel une partie quelconque, détachée d’un individu, est apte à se constituer en un individu nouveau. En d’autres termes, les végétaux, par exemple, se reproduisent non seulement par graines, mais encore par bouturage, par marcottage, etc.

Or personne n’ignore que, dans ce dernier cas, les jeunes présentent non seulement tous les caractères spécifiques, mais encore tous les caractères essentiellement personnels de l’individu d’où ils