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Si le câble cassait, le ballon s’élèverait rapidement dans les airs, mais la soupape automatique inférieure s’ouvrirait aussitôt sous la pression du gaz. Cette soupape qui a 1m,20 de diamètre débiterait 50 à 60 mètres cubes de gaz par seconde, sans augmentation appréciable de pression, c’est-à-dire sous 4 ou 5 centimètres d’eau.

Pendant la première minute le ballon perdrait donc 3 600 kilogrammes de force ascensionnelle, il en perdrait un peu moins pendant la seconde minute, et ainsi de suite pendant les minutes suivantes. Dans de telles conditions, par le seul jeu automatique de la soupape inférieure, l’aérostat ne pourrait s’élever à plus de 2 500 mètres d’altitude.

Nous admettons ici que le ballon est livré à lui-même, et qu’il s’élève librement, il n’en serait pas ainsi dans le fait, puisque MM. Eugène et Jules Godard, et Camille Dartois, sont toujours dans la nacelle, et que jamais le ballon n’accomplit une ascension, sans que deux au moins de ces praticiens expérimentés ne soient au nombre des voyageurs. — Dans le cas de la rupture du câble, les aéronautes tireraient la corde de la soupape supérieure qui peut débiter par minute un volume de gaz correspondant à une force ascensionnelle de 500 à 600 kilogrammes. Le jeu de cette soupape serait utilisé pour l’atterrissage comme dans les ballons ordinaires.

Le ballon captif pourrait être conduit à terre dans les conditions les plus favorables. Jamais jusqu’ici aucun aérostat n’a été plus richement armé pour la descente. On en jugera par la comparaison suivante. Un ballon de 2 000 mètres cubes du siège de Paris offre en section 160 mètres carrés. Le grand ballon représente en section 6 ballons du siège ou 960 mètres carrés en nombre rond. — Or un ballon du siège de Paris était chargé de 120 kilogrammes de cordes d’arrêt et d’ancre : si le ballon captif avait dans le double fond de sa nacelle 1206 = 720 kilogrammes de cordes et de grappins, il pourrait fonctionner dans les mêmes conditions qu’un ballon du siège. Mais il est chargé d’une quantité bien supérieure d’engins d’arrêt, puisqu’il est toujours muni de 1 200 kilogrammes de guide-rope, auxquels il faut ajouter un énorme grappin de 120 kilogrammes, et plus de 1 100 kilogrammes de sacs de lest. Le ballon captif, toute proportion de volume gardée, est donc deux fois mieux équipé pour la descente qu’un ballon du siège de Paris.

Fig. 1. — Appareil employé pour éprouver la solidité de l’étoffe du grand ballon captif à vapeur de M. Henry Giffard.

Il nous est donc permis de terminer par les conclusions suivantes :

1o Le câble du ballon captif ne semble pas devoir jamais se casser, puisque pendant son fonctionnement il est soumis à une traction qui, au maximum, ne dépasse jamais le tiers de celle que nécessiterait sa rupture.

2o Si le câble cassait, les voyageurs dans la nacelle ne s’élèveraient qu’à une faible hauteur par le seul débit de la soupape automatique intérieure. Pour accomplir la descente, les aéronautes se trouveraient dans des conditions bien plus favorables qu’avec les aérostats ordinaires.

Après avoir formulé les conditions qui précèdent, nous ajouterons encore quelques mots sur le bel appareil que M. Giffard a construit pour l’essai du câble de son grand ballon captif. Cet appareil n’intéresse pas seulement le ballon des Tuileries, il va être appelé à rendre de grands services à l’art de la corderie qui manquait jusqu’ici d’un système aussi précis. Il va être employé prochainement à d’autres