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les diverses périodes, au moins pour quelques-uns d’entre eux.

Le type du laurier noble (L. nobilis L.), dont le laurier des Canaries (L. canariensis Webb) ne constitue de nos jours qu’une race, se trouve représenté dans le paléocène par le Laurus Omalii Sap. et Mar. ; dans l’éocène par le Laurus Decaisneana Heer. Lors de l’éocène supérieur des gypses d’Aix, le même type comprend un certain nombre de formes, parmi lesquelles il faut distinguer le Laurus primiyenia, Ung., dont les variétés larges conduisent insensiblement au Laurus canariensis (fig. 3). Il semble que les formes étroites de ce même L. primiyenia, qui sont en même temps les plus anciennes, marquent l’existence d’une race due à l’influence du climat éocène ; les effets de cette influence s’atténuent graduellement à mesure que l’on s’avance vers l’aquitanien et à Armissan d’abord, à Manosque ensuite, la liaison entre les feuilles amplifiées du L. primigenia et celles des Laurus canariensis et nobilis se prononce de plus en plus. Le Laurus princeps Hr., du miocène supérieur se rapproche plus encore de notre laurier, dont la race canarienne se montre enfin, avec tous les caractères que nous lui connaissons, dans le pliocène inférieur de Meximieux.

Fig. 4. — Modifications successives du type Lierre (Hereda) dans le cours de l’époque tertiaire.
1. Hedera prisca, Sap. (Paléocène, Sézanne). — 2. Hedera Philiberti, Sap. (Éocène sup., Gypses d’Aix). — 3. Hedera Kargii, Br. (Miocène, (Eningen) — A. Hedera acutelobata, Sap. (Pliocène inf., Dernbach). — 5. Hedera Mac-Chiri, Hr. (Miocène inf., Groënland). — 6. Hedera Strozti, Gaud (Pliocène inf., Toscane).

Le lierre européen remonte au delà des temps tertiaires ; son ancêtre le plus éloigné est une espèce de la craie cénomanienne de Bohême, Hedera primordialis Sap., dont les feuilles caulinaires étaient largement orbiculaires et cordiformes, avec des feuilles deltoïdes et latéralement arrondies sur les rameaux libres. Ces feuilles étaient entières ou faiblement sinuées le long des bords ; elles rappellent d’assez loin celles de certains Oreopanax d’Amérique, mais elles ressemblent surtout à la race algérienne, connue sous le nom de lierre d’Alger, dont les feuilles presque aussi larges sont cependant bien plus atténuées en pointe au sommet. Les échantillons fossiles de forme deltoïde peuvent même être comparés avec avantage aux feuilles largement ovalaires des rameaux libres de notre type indigène le plus ordinaire ; la disposition des nervures basiliaires et même leur nombre (2 à 3 paires de chaque côté de la médiane ) se trouvant les mêmes de part et d’autre. On peut dire sans exagération que l’aspect de l’Hedera primordialis suffit à lui seul pour attester l’humidité chaude de l’ancienne localité cénomanienne qui nous a conservé ses restes.

Le lierre paléocène de Sézanne, Hedera prisca Sap. (fig. 4), dont nous possédons plusieurs feuilles, s’éloigne assez sensiblement de l’H.primordialis. Il est d’abord plus petit, la dimension de ses feuilles égalant à peu près celle des formes vigoureuses de notre lierre. Les sinuosités de la marge sont devenues ici des saillies anguleuses assez peu prononcées, il