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LA NATURE.

minéraux tels que les ilménites, les grenats, les pyrites, etc. ; les autres, appelées mines de rivières, sont établies dans le lit ou sur le bord des cours d’eau et offrent, en association avec les diamants, des agates, des calcédoines, des péridots.

Dans les deux cas, les diamants sont habituellement fragmentaires, et cela n’a rien de surprenant d’après leur déplorable faculté de faire parfois spontanément explosion, ainsi que nous le disions tout à l’heure. Ce sont justement les plus beaux et les plus gros qui sont le plus sujets à cette infirmité. D’ordinaire la rupture se déclare dans le cours de la première semaine, mais trois mois après : l’extraction, il y a encore possibilité qu’elle se produise. On dit qu’on l’empêche en enduisant la pierre de suif, mais si cet enduit doit être permanent, il diminue singulièrement la valeur de la gemme.

Diamant cristallisé engagé dans un grès verdâtre et provenant des mines du cap de Bonne-Espérance. (Grandeur naturelle.)

Les champs diamantifères sont situés sur la limite de la colonie du Cap et des États libres du fleuve Orange, à environ 1 200 kilomètres de Cape-Town. Leur altitude est d’environ 2 000 mètres. Chacun d’eux correspond à une sorte de bassin qui se signale même de loin par une très-faible élévation du terrain. L’enceinte des bassins, dont les parois descendent en pente régulière vers le centre, est constituée par des roches schisteuses facilement décomposables à l’air. Les couches qui les remplissent consistent en sables et grès gris ou verts, en calcaire et en argiles.

Quoique leur âge géologique ne soit pas encore absolument fixé, cependant, et malgré l’opinion de quelques géologues qui les rapportent au terrain carbonifère, tout porte à penser qu’elles datent de l’époque triasique. Les plantes fossiles qu’on y rencontre et que M. Ralph Tate a décrites, ont tout à fait les caractères de la végétation de cette période, et les reptiles très-nombreux dont les restes y sont enfouis offrent aussi, suivant M. Huxley, des affinités très-intimes avec la faune du trias. D’ailleurs, par ses animaux comme par sa flore, cette formation présente le faciès terrestre ou lacustre. C’est à l’année 1844 que remonte la première découverte de reptiles fossiles dans les couches qui nous occupent. Elle est due à M. Andrews Geddes Bain. Les études, auxquelles les débris recueillis donnèrent lieu, furent poursuivies par de nombreux géologues ; MM. Sharpe, Salter, Egerton, Hooker et Owen, en Angleterre ; MM. Paul Gervais, Albert Gaudry et Fischer, en France. Cette faune erpétologique est aujourd’hui très-considérable. On y distingue des crocodiliens, des lacertiens, des labyrinthodontes et des dinosauriens, dont les vertèbres sont doubles, en dimension, de celles de l’éléphant et d’un tiers plus grosses que celles du mégalosaure. Mais, les plus curieux de ces reptiles, ceux auxquels nous faisions allusion en commençant sont voisins des tortues, dont ils diffèrent néanmoins par des particularités importantes. Leur caractère le plus saillant consiste dans la présence de deux longues défenses aiguës, courbées, analogues à celles des machairodus, des chevrotains et des morses. C’est pour cela que M. Bain les avait nommés bidentals ; on préfère maintenant le nom plus régulier de dicynodon, qui vient du grec et signifie littéralement : deux dents de chien.

Ptyghognathus depressus (Fischer). Crâne fossile découvert dans les couches triasiques du cap de Bonne-Espérance. (Deux tiers de grandeur naturelle.)

Richard Owen, par l’étude approfondie de ces fossiles, reconnut que les dicynodontes étaient, de leur vivant, des animaux ovipares, à respiration pulmo-