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N°29 — 20 DÉCEMBRE 1873
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LA NATURE.

les nouvelles
DÉCOUVERTES PALÉONTOLOGIQUES
du professeur marsh.

Parmi les nombreux animaux d’espèces éteintes découverts récemment aux États-Unis dans les terrains tertiaires de la région des montagnes rocheuses, quelques-uns des plus remarquables sont des mammifères gigantesques, provenant des dépôts éocènes de Wyoming importe donc de les faire connaître, et des renseignements exacts sur ces fossiles sont d’autant plus opportuns que des erreurs ont été commises à ce sujet. Ces animaux égalaient presque l’éléphant par la taille. La tête osseuse, longue et étroite a trois paires de cornes bien séparées entre elles. La mâchoire supérieure est armée de grandes défenses courbes, dirigées en bas, constituées par les canines et rappelant celles des Morses, mais elle est dépourvue de dents incisives. Les molaires, au nombre de six, sont très-petites et d’une forme particulière.

On a trouvé plusieurs espèces de ce type mammalien remarquable, mais toutes ne peuvent pas encore être décrites avec certitude. L’espèce typique du groupe, le Dinoceras anceps, fut découverte en septembre 1870. En 1872, le professeur Cope donna le nom de Loxolophodon semicinctus à une espèce analogue à celle dont il va être question, et dont une de nos gravures représente un type très-voisin, le Loxolophodon cornutus.

Le musée de Yale-College possède aujourd’hui les débris d’un grand nombre d’individus appartenant à l’ordre des Dinocerata auquel se rapportent les types de diverses espèces déjà décrites par le professeur Marsh[1]. Celles-ci sont toutes représentées par des pièces bien caractérisées, et l’une d’elles, le Dinoceras mirabilis, par une tête entière et un squelette presque complet. Cette circonstance a permis à l’auteur de déterminer avec certitude les caractères et les affinités de ce très-singulier groupe d’animaux. La plupart des caractères crâniens ont été constatés sur une tête dans un état de conservation parfaite, et que représente la gravure ci-dessous.

1. Dinoceras mirabilis. — 2. Loxolophodon cornutus.

Cette tête est remarquablement longue et étroite, Les trois paires de cornes osseuses qui la garnissent s’élèvent successivement l’une au-dessus de l’autre, et l’énorme crête qui entoure la concavité profonde du sinciput contribue, ainsi que les grandes défenses décurrentes, à lui donner un aspect singulier dont aucun autre animal vivant ou fossile ne nous offre d’exemple. La structure de la tête nous présente aussi plusieurs particularités intéressantes à noter. L’os sus-occipital est très-développé, et après s’être élevé au-dessus de la boite crânienne, constitue une crête énorme qui se prolonge obliquement en arrière au delà des condyles. Antérieurement, cette crête se continue de chaque côté, obliquement, au-dessous des fosses temporales, qui sont très-grandes. Les portions latérales sont formées essentiellement par les pariétaux ; les cornes de la paire postérieure en naissent et au-dessous de ceux-ci elle présente en dedans un épaississement. En avant de ces cornes les crêtes s’abaissent rapidement et s’effacent presque entièrement au-dessus du centre des orbites. Les cornes dont il vient d’être question sont plus hautes que les cornes antérieures et leur sommet est obtus et aplati transversalement. Les os frontaux ne donnent naissance à aucune apophyse post-orbitaire, et les orbites ne sont pas séparées des fosses temporales. L’os squameux constitue la partie inférieure de la fosse temporale et envoie vers le bas un prolongement post-glénoïdal très-fort ; une apophyse zygomatique, qui s’en détache aussi, se porte en avant et ressemble à celle du Tapir. L’os malaire complète en avant l’arcade zygomatique, disposition qui n’existe chez aucun proboscidien connu. L’os lacrymal est grand et constitue le bord antérieur de l’orbite comme

  1. American Journal of Science and Arts. 1873. t. IV.