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N° 38. 21 FÉVRIER 1874.
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LA NATURE.

LA RECONSTRUCTION

D’UN SQUELETTE FOSSILE

On s’imaginerait difficilement, en voyant aujourd’hui tel qu’il apparaît, reconstitué dans son ensemble et se dressant dans son attitude naturelle, le magnifique et gigantesque squelette du mégathérium dont s’est enrichi le Muséum d’histoire naturelle[1], et dont nous donnons la figure entière, tout ce que la reconstruction ostéologique de cet animal a pu exiger de travail persévérant et de talent ; nous avons pensé que quelques détails à ce sujet ne seraient pas sans intérêt pour nos lecteurs.

Il importe d’abord que nous fassions connaître dans quel état se trouvent le plus souvent les squelettes fossiles quand on les retire de leurs gisements. et que l’on sache bien que les os qui ont dû séjourner pendant des siècles dans des matières terreuses ont à peu près perdu constamment jusqu’à la dernière trace de la matière organique qui constitue le moyen de cohésion de leurs molécules. Dans cette condition, c’est-à-dire, réduits à leurs éléments calcaires, ces os sont ordinairement recueillis en fragments désagrégés et friables ; après leur exhumation, la dessiccation et l’exposition y déterminent encore inévitablement de nouvelles brisures.

[Image à insérer]
Vue d’ensemble du nouveau Megathérium dans les galerics du Muséuin

En sorte que lorsqu’on se propose de monter un squelette fossile, on a d’abord à se livrer à une besogne incroyablement laboricuse, qui consiste à trier les innombrables fragments plus ou moins mélangés, à les débarrasser de la gangue qui les recouvre, à chercher leurs places, et, enfin, à réunir, ressouder ceux qui vont ensemble, c’est-à dire qui font partie d’un même os. Il ne reste plus après cela, pour leur donner un peu de solidité, qu’à imprégner d’une faible solution gélatineuse les différentes pièces osseuses reconstituécs.

Il y a, comme on voit, dans les diverses manipulations que nous venons d’indiquer et qui ont pour objet la reconstruction des os, quelque chose qui rappelle exactement l’exercice du jeu de patience, mais ici le jeu exige non-seulement la persévérance la plus opiniâtre, mais encore des connaissances étendues en ostéologie comparée.

La restauration des os terminée, on passe à l’opération du montage, qui, pour les grands animaux tels que le mégathérium que nous avons ici particulièrement en vue, ne peut être bien réussi qu’à l’aide du concours d’un mécanicien habile.

Les différentes régions du squelette, bien disposées successivement dans leurs rapports naturels, selon l’attitude l’on veut donner à l’animal, sont que provisoirement soutenues par des échafaudages de2° année. — 1er semestre. 12

  1. Voy. la table de la première année : le Mégathérium du Museum