Page:La Nature, 1874, S1.djvu/176

Cette page n’a pas encore été corrigée
172
LA NATURE.



ment de la mer de Sargasse, l’abondance et l’épaisseur des masses d’herbes flottantes, surtout dans la partie qui se rapprocha des côtes d’Afrique, doivent, faire regarder comme probable leur formation sur place, dans des eaux relativement calmes, sans exclure l’apport dû au Gulf-Stream, constaté d’ailleurs par Agassiz dans l’expédition scientifique du Hassler, en 1871.

Dans une des très-instructives et utiles publications[1] qui résument les études du Comité météorologique de Londres, la carte générale des courants de l’Atlantique nord montre la direction des courants de surface, ainsi que leur vitesse moyenne pour chaque mois de l’année, en mêmo temps que la température moyenne de l’eau à la surface de la mer pour la même période. Cette carte, que consulteront avec fruit les navigateurs et les savants, donne d’intéressants détails, que nous ne pouvons ici qu’indiquer, sur les variations de vitesse, de direction et de température du Gulf-Stream, ainsi que des autres grands courants de l’Atlantique nord, aux différentes époques de l’année. C’est par de semblables études que pourra s’établir une théorie générale des courants océaniques, déterminant les rapports du Gulf-Stream avec ces courants.

Les belles recherches du major Rennell, cité par Maury, ont montré l’influence exercée eu certaines années par les variations des courants océaniques sur le climat des régions que ces courants baignent ou avoisinent. Ainsi le développement inaccoutumé du Gulf-Stream dû à une plus grande vitesse initiale, dont les ci uses ne sont pas encore bien connues, produit en France et dans le sud de l’Angleterre des hivers singulièrement chauds, pendant lesquels les vents d’ouest et de sud-ouest se succèdent presque sans intervalle, amenant des pluies excessives. Si les études plus complètes qui sont aujourd’hui poursuivies confirment cette observation, on arrivera probablement à constater l’accroissement de vitesse du Gulf-Stream lorsqu’il débouche du canal de la Floride. Or, comme le remarque justement Maury, le phénomène observé devant précéder de plusieurs semaines les modifications de climat produites par le développement exceptionnel du courant, dont les eaux, à partir de la Floride, ont 3, 000 milles à parcourir avant d’atteindre nos côtes, on pourrait être prévenu de ces modifications assez à l’avance pour profiter de l’avertissement.

Les vitesses et les dimensions anormales des courants de la mer ont été observées dans d’autres parties du globe. Maury considère ces phénomènes comme des sortes d’efforts au moyen desquels l’Océan rentre au besoin dans ses conditions habituelles d’équilibre. Les soudaines débâcles de glaces, citées par les voyageurs des mers polaires, sont, très-probablement, la conséquence immédiate d’un phéno

mène de ce genre, comme peut l’être aussi, dans certaines latitudes, l’apparition éventuelle d’immenses ice-bergs.

En pénétrant dans les mers polaires, les branches du Gulf-Stream se changent quelquefois en courants sous-marins, dont on a constaté l’existence dans la mer de Baffin, à l’ouest du Groënland. Les navigateurs y ont rencontré des ice-bergs remontant du sud au nord, dans une direction contraire à celle du courant de surface. On sait que ces masses énormes de glace plongent à une grande profondeur dans l’eau, et doivent par suite y subir l’impulsion des conlre-courants. Les observations faites sur la direction du courant polaire, de la Nouvelle-Zemble à l’Islande, indiquent également un cours sous-marin du Gulf-Stream dans ces parages.

« Les causes de formation du Gulf-Stream, a dit Maury, ont toujours embarrassé les savants, et, quoique les recherches et les observations modernes aient apporté quelques lumières sur ce sujet, riendohieii clair n’a encore été trouvé. » Aujourd’hui la somme de renseignements que l’on possède, grâce surtout aux études des officiers de marine et des hydrographes de l’Amérique et de l’Angleterre, ont permis de proposer des théories nouvelles et plus complètes des courants océaniques, mais aucune n’a encore été entièrement acceptée.

E. Mahcollé.

— La Suite prochainement. —





LES INFUSOIRES

On sait que la classe des infusoires est immense dans sa variété, autant que dans les moyens de sa reproduction. Cette dénomination à’infusoires est due aux circonstances dans lesquelles nous les voyons se reproduire. En effet, ils semblent être une émanation directe des décompositions végétales soumises à l’infusion. On sait peu de chose sur leur origine ; les recherches entreprises par de patients investigateurs sur leur génération, ont cependant abouti à plusieurs observations importantes. On voit dans leur corps, des petits granules ronds gros ou petits, très-multipliés, qui occupent toute l’étendue de leur corps. On regarde ces corpuscules comme des œufs, appelés à jouer un rôle reproducteur (fig. 1).

Les infusoires ont aussi un mode de propagation fréquemment observé, qu’on nomme l’enkystement. Il se produit à l’intérieur du corps, par une sorte de sécrétion, un noyau qui n’est autre chose que l’animal futur ; par l’induration de ce kyste, il finit par s’intégrer dans son propre cercueil. Dès que cette métamorphose commence, il perd graduellement sa vivacité, et finit par tomber dans un état léthargique. Ensuite, le corps se rompt en petites pelotes, d’où sortent des cellules, qui laissent échapper des infusoires rudimentaires, destines à devenir semblables à leur procréateur.

  1. Currents and surface temperature of the North Atlantic Ocean, from the equator to latitude 40° N. for each month of the year, with a general current chart — Londres, 1872.