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LA NATURE.

Saint-Roch, patron des pestiférés, est tourné du côté d’Haybes — du côté de la concurrence.

Voici le dernier jour de la course. Dès le matin nous quittons Fumay, et un double passage de la Meuse nous amène à Haybes. M. Nivoit nous y montre de loin une intéressante fabrique d’acide pyroligneux qui, grâce à une ingénieuse disposition, retire du bois 45 p. 100 de produit au lieu de 33 p. 100 qu’on obtient d’ordinaire. Le bois est mis en meule comme dans la carbonisation des forêts, puis la moule est recouverte d’une série de pièces de tôle, avec tubes de dégagement à la partie supérieure, et qui constituent de véritables cornues dans lesquelles a lieu la distillation.

Les Dames de Meuse (D’après nature.)

À Fépin, nous retraversons la rivière pour escalader la montagne et voir en place le célèbre poudingue dévonien de cette localité. Je dis célèbre et c’est le mot : le poudingue de Fépin est connu dans le monde entier. Le savant et aimable directeur de l’Observatoire de Colombie, M. Gonzalès, qui est des nôtres, connaît le poudingue de Fépin, et cela à cause des publications et des discussions dont il a été l’objet. On comprendra sans peine que des géologues ne reculent pas devant une ascension très-roide au milieu des épines pour aller voir en place cette roche illustre. Pour l’aspect, au moins dans les variétés que nous avons recueillies, c’est quelque chose de très-analogue aux arkoses de la Bourgogne, mais comme âge, c’est le contemporain du poudingue de la Roche aux Corpiats ; c’est-à-dire qu’ici encore nous sommes à la base du terrain dévonien, à son contact avec le terrain silurien. Il n’y a rien de plus intéressant en géologie que l’étude des contacts des terrains successifs. C’est là qu’on peut espérer de trouver la solution du grand problème du renouvellement des faunes.

À Haybes, nous prenons le train, qui peu après nous dépose à Vireux, en plein terrain dévonien. La carrière qui attire d’abord notre attention est ouverte dans un magnifique grès rouge, un peu micacé, passant par places au vert. Les couches sont très-fortement redressées et leur surface présente ces curieux vestiges auxquels on a donné le nom pittoresque de vent fossile. Ce sont des ondulations parallèles entre elles et si semblables à celles qui se produisent à la surface du limon sous une mince couche d’eau agitée par le vent, qu’il n’y a pas à douter que leur origine ne soit la même. Ici encore, nous sommes donc sur une plage de la mer dévonienne.

Dans ce grès, les fossiles proprement dits ne se montrent pas, mais un peu plus loin, des couches calcaires exactement de même âge nous donnent en abondance des produtcus, des spirifer, des orthis et des polypiers variés. Une mince couche de minerai de fer est intercalée dans le calcaire. Les coquilles y sont si abondantes et tellement serrées les unes contre