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LA NATURE.

en soit dotée. L’introduction des vapeurs sur les rivières, a quadruplé le commerce à cause de leur rapidité, et surtout à cause des sécurités qu’ils offrent contre les pirates, qui sont la plaie de la navigation chinoise.

Les routes sont en simple état de nature. Les profondes ornières des véhicules primitifs du pays en indiquent la direction. Souvent ces ornières rendent le passage impraticable, mais la pluie les comble, le soleil, durcit la masse, et ce procédé de réparation suffit aux besoins de la population. Les voitures sont tout aussi primitives ; dans certaines provinces, il y a des chariots à deux roues, mais généralement dans les provinces du centre, on emploie un véhicule à une seule roue, dans le genre d’une brouette, et dans les districts montagneux, ce grossier véhicule cède la place aux bêtes de somme.

Les transports par terre, demandent vingt à quarante fois plus de temps que ceux par eau, et l’on conçoit que les transports des minerais de charbon ou de fer soient pratiquement impossibles. Dans la province de Shansi, le charbon qui coûte 1 shilling par tonne à la mine, s’élève à 24 shillings à 30 milles, et à 42 shillings à 60 milles, de sorte que ceux qui demeurent près des puits d’extraction sont les seuls qui puissent profiter du charbon produit par le Céleste-Empire. Il en est de même pour tous les transports en Chine, ce qui empêche le développement de ses productions, et permet de constater d’effroyables famines dans un pays où les récoltes sont splendides et d’une grande abondance[1].


LES SCAPHANDRES

C’est à l’Exposition universelle de 1867 que la Compagnie sous-marine de New-York fit connaître au public parisien cet étrange système qui permet à l’homme de séjourner au sein de l’eau, grâce à un costume imperméable, qui forme enveloppe autour de son corps, et au sein auquel on insuffle l’air nécessaire à la respiration. Depuis cette époque l’art du plongeur n’est pas resté stationnaire ; le système Cabirol, perfectionné par MM. Rouquayrol-Denayrouze, est entré récemment dans une nouvelle voie de progrès, comme l’atteste le système exhibé à l’Exposition de Vienne. Nous avons pu nous procurer des renseignements complets sur le nouveau scaphandre, dont nos lecteurs ont sous les yeux l’ensemble et les détails. Il a été construit par une société prussienne le Königsberg Mashinenbau Action-gesellschaft Vulkan, et est très-usité sur la côte orientale de la Prusse pour récolter l’ambre. Cet appareil est fort bien construit ; il a déjà reçu, avant la récompense qui lui a été décernée à Vienne, une médaille d’or à l’Exposition de Moscou.

Dans l’appareil prussien, l’air est transmis au plongeur à travers des longs tubes de caoutchouc, au moyen d’une pompe à air à deux cylindres, facilement transportable. Ces tubes, renforcés par des fils de fer en spirale, conduisent l’air dans un régulateur fixé au dos du plongeur. Le costume du plongeur, complètement imperméable à l’air et à l’eau, est réuni au moyen d’un anneau en caoutchouc à un casque en cuivre ou à un masque à ouvertures de verre grillagé. Le casque s’emploie pour des travaux sous-marins où le plongeur peut tenir la tête droite (comme pour réparer des navires, par exemple), tandis que le masque est principalement adopté pour les recherches et les investigations au fond de la mer.

Un des grands avantages de cette disposition est que le plongeur a toujours une certaine quantité d’air en réserve dans le régulateur, de façon qu’une interruption dans la manœuvre le met à l’abri d’un danger immédiat ou d’autres inconvénients. L’approvisionnement d’air fourni au plongeur est réglé par une soupape d’une construction particulière, au moyen de laquelle la pression du gaz respirable est en rapport avec la profondeur de l’eau où le plongeur travaille.

Les produits de l’expiration ne se mélangent pas avec l’air frais envoyé au scaphandre ; ils s’échappent par une ouverture latérale fermée au moyen d’une soupape en caoutchouc. Le plongeur peut augmenter ou diminuer à volonté son poids spécifique, en changeant simplement le volume d’air qui se trouve entre son corps et l’enveloppe, de façon qu’il est en son pouvoir de monter ou de descendre à volonté[2].

Le système nouveau a été fort remarqué à l’Exposition de Vienne, et plusieurs publicistes allemands ont rappelé à ce sujet, non sans une fierté bien légitime du reste, que l’invention du scaphandre est d’origine allemande. Nous avons trop de respect pour la vérité pour nier ce fait. C’est un Français, l’abbé de Lachapelle, qui, pour la première fois, en 1769, donna le nom de scaphandre (du grec σκάφος, bateau ; ἀνήρ, ἀνδρός, homme) à un appareil tellement simple, qu’il ne consistait guère qu’en une ceinture de sauvetage. C’est bien un habitant de Breslau, nommé Klingert, qui créa, en 1797, le premier appareil de plongeur, véritable point de départ des systèmes modernes. Il enfermait un homme dans un cylindre métallique hermétiquement clos, au milieu duquel on envoyait de l’air à l’aide d’une pompe. L’expérience publique exécutée en juin 1797 eut un grand retentissement ; un certain Frédéric-Guillaume Joachim, revêtu de l’appareil, alla scier un tronc d’arbre au fond de l’Oder. Quand il revint sur le rivage, il fut salué par les ovations enthousiastes d’une foule intelligente, qui applaudissait à une nouvelle et réelle conquête dans le domaine du progrès.

Bien des années s’écoulèrent avant que le système quelque peu barbare et, pour ainsi dire, rudimentaire de l’Allemand Klingert, se perfectionnât. Il faut fran-

  1. Revue maritime et coloniale.
  2. Engineering.