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viron d’heure avant le soleil ; puis, après avoir atteint le 19 son élongation occidentale maximum, il se rapproche peu à peu de l’astre radieux. Son ascension droite varie de 16 h. 24 m. à 17 h. 27 m., et sa déclinaison de 20° 13′ à 22° 37′ ; dans l’intervalle la planète décrit, entre le Scorpion et Ophiucus, une de ces boucles qui résultent de la combinaison de son mouvement avec celui de la Terre.

Vénus, que nous avons laissée dans la constellation de la Balance, passera dans Ophiucus et traversera pendant le mois de décembre l’une des deux branches de la Voie lactée, sur les confins du Sagittaire. La brillante planète sera visible le matin, puisque le 1er du mois elle se lèvera à 5 h. 42 m., ou 1 h. 52 m. avant le soleil, et qu’à la fin de décembre, elle devance encore le soleil de plus d’une heure. Vénus se rapproche du soleil, dans son mouvement apparent, tout en s’éloignant de la Terre.

Mars aussi s’éloigne de nous de plus en plus. Il ne se lève guère que trois ou quatre heures après le soleil, et se couche de bonne heure, entre 8 h. 20 m. et 8 h. 32 m. du soir. L’observation en devient de plus en plus défavorable et difficile. Il reste pendant tout le mois dans le Capricorne (Asc. dr. 20 h. 36 m. à 22 h. 8 m., décl. australe 20° 4′ à 12° 38′).

Jupiter, qui sera en quadrature le 22 décembre, se lève en ce mois au milieu de la nuit, entre 1 h. du matin et 11 h. 1/4 du soir ; il passe au méridien avant le lever du soleil. La portion de son orbite qu’il décrira, du 1er au 31, sera une ligne située dans la Vierge, à peu de distance de l’équateur, qu’il franchira du 16 au 17 décembre (Asc. dr. 11 h. 57 m. à 12 h. 7 m., décl. boréale 1° 36′, australe 0° 38′}.

Saturne est, comme Mars, dans le Capricorne ; il marche vers sa conjonction, qui aura lieu le 24 janvier. Son lever a lieu entre 11 h. et 8 h. 1/2 du matin et son coucher entre 7 h. 44 m. et 6 h. du soir. Donc, circonstance défavorable à l’observation.

Uranus, au contraire, va vers son opposition, qui aura lieu le 23 de janvier de 1874. C’est dans le Cancer qu’il faut chercher cette planète qui, d’ailleurs restera visible toute la nuit, puisqu’elle se lève entre 8 h. 1/2 et 6 h. 1/2 du soir et passe au méridien entre 3 h. et 4 h. du matin. Voici ses coordonnées équatoriales en décembre : ascension droite de 8 h. 52 m. à 8 h. 49 m. ; déclinaison boréale, de 18° 15′ à 18° 31′.

Enfin, Neptune, dans les Poissons, sera également visible, aux positions suivantes : 1 h. 39 m. à 1 h. 38 m. d’ascension droite ; 8° 25′ à 8° 20′ de déclinaison boréale.

Amédée Guillemin.

LES PROFONDEURS DE LA MER[1]

M. C. Wyville Thompson vient de publier, en Angleterre, le récit complet et systématique des croisières faites en 1868, par le Lightning, en 1869 et en 1870, par le Porcupine, sous la direction scientifique de trois membres de la Société royale de Londres : l’auteur, le docteur Carpenter, qu’on peut appeler sans exagération le prince des micrographes anglais, et M. Gwyn Jeffreys.

L’espace soumis aux investigations des savants anglais s’étend depuis les îles Féroé jusqu’au détroit de Gibraltar. C’est donc, comme on le voit, une grande et utile préface à l’admirable voyage de circumnavigation du Challenger, dont nous rendons compte au fur et à mesure que les nouvelles nous arrivent.

C’est dans ces trois campagnes d’essai que les instruments qui permettent de porter la sonde à 4 000 mètres ont été inventés, perfectionnés, et qu’ils ont fonctionné pour la première fois sur une grande échelle. Dans cet admirable ouvrage, que les explorateurs du fond des océans consulteront forcément, M. Wyville Thompson indique avec le plus grand soin tous les détails nécessaires pour exécuter les sondages sous-marins. Afin de bien faire comprendre ce que sont ces opérations, nous allons relever les détails de celle qui fut exécutée dans la baie de Biscaye, le 22 juillet 1869, par 2 435 brasses.

Comme le navire était poussé par une jolie brise, la drague était descendue obliquement ; on fut donc obligé de mettre à la mer 3 000 brasses de corde, pesant 2 250 kilos dans l’air. Cette corde perdait dans l’eau les trois quarts de son poids et se trouvait donc réduite à 562 kilos une fois qu’elle avait quitté le bord. Quoique la drague pesât 150 kilos, le câble ne serait pas descendu assez rapidement, puisqu’il n’avait qu’un excès de poids égal à 1/4. On y attacha donc trois plombs, destinés à accélérer ce mouvement, l’un de 50 kilos et les deux autres de 25 kilos chacun. Malgré cette précaution, le bout de la corde mit plus d’une heure à arriver au fond de la mer. On laissa la drague traîner pendant quelque temps, afin de lui donner le temps de ramasser des objets variés, et on la releva avec une vitesse de 10 brasses par minute, quand on eut lieu de croire qu’elle avait dû faire de bonnes prises. Il fallut 5 heures de travail continu, à la machine pour la ramener à bord avec 70 kilos de matières. L’opération, commencée à 4 heures du soir, était terminée à 1 heure du matin.

Les manœuvres auxquelles se livre actuellement le Challenger ne sont pas moins pénibles. Est-ce que ces difficultés ne doivent point augmenter notre admiration pour les hommes infatigables qui sont arrivés à les vaincre ?

Un fait capital mis en évidence, c’est que tous les raisonnements abstraits faits a priori sur des considérations théoriques pêchent par la base. C’est l’observation seule qui peut permettre d’édifier sur des découvertes inébranlables l’histoire physique de ces régions profondes. Il y a, dans l’empire sous marin, des zones froides et des zones chaudes. Les zones froides semblent reposer sur un même sol que les

  1. The Depths of the sea, by C. Wyville Thompson. London, Macmillan and C°, 1873.