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LA NATURE

LE CIEL AU MOIS DE DÉCEMBRE 1873

Le 21 de ce mois, à 5 heures 42 minutes du soir (temps moyen, de Paris), le soleil aura atteint sa plus grande déclinaison australe : son centre sera à 23° 27′ 27″ au-dessous de l’Equateur ; l’hiver astronomique commencera. Trois jours plus tard, le 24 décembre, il y aura, à peu de chose près, coïncidence entre le temps moyen et le temps vrai, puisqu’il ne s’en faudra que d’une seconde que le centre du soleil passe au méridien à midi vrai ; en d’autres termes, l’équation du temps se trouvera à peu près nulle, ainsi qu’il est arrivé à trois autres époques de l’année, le 15 avril, le 14 juin et le 31 août. Ce jour-là, on pourra régler, sans correction, sa montre sur le soleil.

Nous arrivons aux plus courts jours, aux plus longues nuits. Ce serait l’époque la plus favorable pour les observations astronomiques, si les nuits étaient sereines, si le froid n’était un peu rigoureux pour les stations nocturnes en plein air. Les régions du ciel qui, en décembre et sous les latitudes tempérées de l’hémisphère boréal, défilent devant l’observateur, sont des plus riches et des plus intéressantes. Supposons-nous au solstice et passons en revue les principales constellations visibles pendant la nuit, entre 6 heures du soir et 6 heures du matin.

Du côté du nord, nous avons toujours le même spectacle, puisque la même zone circumpolaire est toujours en vue. À l’heure où commence notre révision stellaire, la grande Ourse est couchée à l’horizon ; les sept étoiles du Chariot, grâce à l’illusion optique qui agrandit tous les astres, forment une figure d’une dimension considérable, tandis que, tout près du zénith, Cassiopée semble au contraire réduite à ses dimensions les plus faibles. La Voie lactée s’étend de l’ouest à l’est, en montant jusqu’au-dessus de nos têtes, et l’on voit poindre de l’orient sur ses bords, les premières étoiles d’Orion. Du côté du midi, c’est Andromède, le Carré de Pégase qui occupent la scène, près du méridien. Si le ciel est bien pur, on pourra distinguer aisément à l’œil nu la nébuleuse d’Andromède, à peu près à distance égale de l’étoile Alpha, la plus brillante d’Andromède et l’angle nord-est du Carré, et de l’étoile Alpha de Cassiopée. On aperçoit un petit nuage de forme ovale, voisin d’une étoile de quatrième grandeur, ν d’Andromède, étoile qui avec les deux précédentes, forme un triangle presque isocèle et très-aplati. Déjà à cette heure, on voit briller à l’est, les Pléiades, et, à leur suite, Aldébaran, dont la lumière rouge scintille au milieu d’une foule de petites étoiles, les Hyades. À l’opposé, au couchant, la Lyre et l’Aigle vont bientôt disparaître dans les brumes de l’horizon.

Peu à peu le décor va changer. Du côté du nord, la rotation diurne ne fera que modifier les positions des étoiles de la zone relativement à l’horizon. La grande Ourse va se relever vers l’est, Cassiopée au contraire s’incliner vers l’ouest, et ce sera au tour du Cocher et de la Chèvre de monter au zénith.

À minuit, c’est Orion qui resplendira et dont le magnifique quadrilatère aura déjà dépassé le méridien. Aldébaran et Sirius lui feront cortège, prolongeant ainsi l’une de ses diagonales, du sud-est au nord-ouest. Les deux brillantes des Gémeaux, Pollux et Castor, puis un peu plus bas Procyon, et, vers l’orient, Régulus, qui traîne avec lui le grand Trapèze du Lion surmonté d’une couronne d’étoiles formant avec Régulus, comme une faucille. À ce moment, les amateurs qui voudront observer des nébuleuses fameuses, auront le choix : au milieu d’Orion, au bas des trois étoiles du Baudrier, brille l’étoile que les plus puissants télescopes ont décomposée, d’abord en quatre étoiles (celles connues sous le nom de quadrilatère d’Orion) puis en six, et même en sept étoiles distinctes. θ occupe le centre d’une des plus curieuses, des plus étranges nébuleuses que l’on connaisse, et qui, observée il y a deux siècles par Huyghens, a été l’objet de l’étude approfondie de plusieurs astronomes contemporains, J. Herschel, O. Struve, Liapounow et Bond. Les amas des Gémeaux et du Cancer, que les bons yeux distinguent à l’œil nu, se trouvent également en vue.

De minuit à 6 heures du matin, la scène change encore par l’effet naturel de la rotation diurne, et quand l’aurore commencera à effacer les plus faibles étoiles, on verra briller encore, de part et d’autre du méridien, vers le sud, le Lion et le Bouvier ; entre les deux constellations, se trouve le petit groupe d’étoiles de la Chevelure de Bérénice. Plus haut, entre celle-ci et la Grande-Ourse qui, à cette heure, est remontée au zénith, sont les Lévriers et les Chiens de chasse. C’est une constellation peu apparente ; mais elle renferme une des plus belles nébuleuses spirales du ciel. J. Herschel l’avait dessinée comme une nébulosité circulaire ou elliptique : le gigantesque télescope de lord Rosse réussit à la décomposer en partie en étoiles, en même temps qu’il reconnaissait la forme distincte de ses spirales lumineuses. Puis vint notre regretté Chacornac, qui, à son tour, reconnut la même forme dans une petite nébuleuse qui se rattache à la première. Vers l’orient, Hercule vient de se lever, précédé par la Couronne boréale, que les astronomes doivent surveiller, afin de voir si l’étoile temporaire qui a paru en 1866, et depuis s’est éteinte ou du moins abaissée à la neuvième grandeur, ne reprend pas son éclat.

La date du 11 au 13 décembre est signalée par un essaim périodique d’étoiles filantes : son point radiant, reconnu par l’astronome Greg, est l’étoile θ des Gémeaux. Avis aux observateurs de ces météores.

Nous avons, pour ce mois ci, peu de chose à dire en ce qui concerne l’astronomie planétaire. Les positions des planètes seront, en général, peu favorables à l’observation. Passons-les rapidement en revue, en suivant, comme toujours, l’ordre de leurs distances au soleil.

Mercure, en décembre, se lève d’abord un quart en-