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PRÉFACE.

canisme d’un appareil de physique et faire comprendre les rouages d’une machine à vapeur sans la gravure qui reproduit cet appareil et cette machine ? Le professeur de science n’a-t-il pas toujours sous la main le tableau noir, où il complète son enseignement par des traces à la craie ? La gravure sur bois, le diagramme, sont à l’écrivain ce que le tableau noir est au professeur.

Si l’on voulait se borner à faciliter l’intelligence du texte, il suffirait de simples figures, analogues à celles que publient les livres techniques. Nous avons pensé que le public ne se plaindrait pas d’avoir plus encore, qu’il ne reprocherait pas aux gravures d’une revue, toute scientifique qu’elle soit, d’être exécutées avec un grand soin. Un beau paysage géologique, un tableau représentant la reconstitution d’espèces fossiles, la coupe d’un fleuve où nagent les poissons qu’on étudie, ne charment-ils pas l’œil bien plus que des tracés froids et sévères ? Quel inconvénient y aurait-il à embellir une figure de science ? pourquoi ne serait-elle pas une œuvre d’art si elle ne cesse d’être exacte et sérieuse ? pourquoi craindrait-on même parfois d’animer les scènes, de représenter une machine en action, sans s’arrêter de parti pris devant les limites du pittoresque ? pourquoi le journal scientifique serait-il condamné à être aride, sec et souvent ennuyeux ? ne gagnerait-il pas, au contraire, à prendre l’aspect d’un livre attrayant, agréable, afin d’attirer les lecteurs et d’augmenter le nombre de ceux qui aiment l’étude ?

C’est dans cet esprit que nous avons conçu le plan de la Nature, et que nous nous sommes adressés à des savants depuis longtemps connus et aimés du public, pour nous aider à le mettre à exécution. Nous sommes heureux d’avoir pu grouper autour de nous quelques écrivains éminents, qui ont bien voulu devenir nos collaborateurs, mais que pour la plupart nous n’avons cessé de considérer comme nos maîtres.

Une œuvre comme celle que nous avions en vue ne pouvait se réaliser qu’avec un tel concours ; nous avons voulu, en effet, fuir l’écueil de l’erreur et de l’inexactitude, où se brise inévitablement celui qui traite seul les questions multiples qui se rattachent aux différentes branches de la science. Il n’est pas de savant universel, aujourd’hui surtout où le domaine de la science est si étendu. Un astronome ne peut pas bien parler chimie, pas plus qu’un chimiste ne saurait traiter sûrement les questions astronomiques. Cela est peut-être encore plus vrai, quand il s’agit d’écrire pour tout le monde, et quand il faut exposer d’une façon claire des questions complexes et difficiles.

Nous avons cherché dans ce recueil à mettre le lecteur en mesure de suivre les travaux de la France et de l’étranger en 1873. Nous vivons malheureusement souvent dans l’ignorance complète de ce qui se passe au delà de nos frontières ; aussi avons-nous pensé qu’il y