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tiques, se comporte plutôt comme le fer terrestre. D’un autre côté, on fait disparaître complètement la différence en question, si avant de soumettre le fer de Caille à l’expérience de Widmannstætten, on le fait fondre pour le laisser ensuite refroidir très-lentement. Par suite de cette fusion, le fer météorique, sans changer de composition, perd sa structure reconnaissable aux acides et acquiert dès lors tous les caractères du fer de Deesa. C’est une espèce de métamorphisme. De façon que, dans le fer de Deesa, les fragments pierreux résultent du métamorphisme de la pierre d’Aumale et le fer du métamorphisme du fer de Caille. À part les conséquences qui résultent de ces faits, quant aux relations stratigraphiques, il faut bien remarquer qu’ils nous révèlent parmi les météorites des actions géologiques dont on était bien loin de se douter et qui établissent entre ces roches et les masses minérales terrestres une analogie intime.

En effet, il n’y a qu’une manière d’expliquer la formation du fer de Deesa, dont la nature complexe et les détails de structure sont si remarquables. C’est d’y voir le premier échantillon qui ait été signalé d’un filon éruptif extra-terrestre tout semblable, à la nature près, aux dykes de porphyre et de basalte que renferme en si grand nombre l’écorce de notre globe. Évidemment du fer de Caille, préalablement fondu, a été injecté au travers d’assises superposées et fracturées de roche d’Aumale qui, sous l’influence de la chaleur, s’est transformée en roche de Tadjera et s’est trouvée empâtée en fragments dans la pâte métallique, comme des débris de gneiss, par exemple, sont si souvent empâtés dans les filons de granite.

Fig. 3. — Failles rejetées les unes par les autres dans la météorite tombée, le 4 juin 1812, à Aumières (Lozère). (Demi-grandeur naturelle.)

Nous allons revenir sur ces faits importants qui montrent dans le gisement originel des météorites tant d’analogies avec la terre elle-même, mais avant, et pour résumer ce qui précède nous dirons que dès aujourd’hui il y a plus de vingt types distincts de roches météoritiques pour lesquels est faite la preuve des relations stratigraphiques. Les méthodes qui ont concouru à cette démonstration et sur lesquelles nous ne pouvons insister, sont très-nombreuses et leur conclusion commune est d’autant moins attaquable.

Il en résulte que l’on est en droit de constituer à proprement parler une géologie des météorites, qui, dès maintenant, a fourni des données intéressantes. Elle consiste à déterminer le rôle géologique de divers types météoritiques comparés aux roches terrestres, et, comme résumé de ces études, à tenter la restauration du globe d’où proviennent les roches cosmiques.

Déjà nous venons de voir, par l’exemple du fer de Deesa, qu’il y a des météorites éruptives. Et notons en passant, que les fers, d’ailleurs assez nombreux, qui ne donnent pas de figures par l’expérience de Widmannstætten peuvent être considérés, d’après ce qui précède, comme des échantillons de filons entièrement métalliques. D’un autre côté des études spéciales ont montré que la pierre de Chantonnay représente à l’inverse un type de filons complètement pierreux. Il y a donc parmi ces filons cosmiques au moins autant de variété que parmi les filons terrestres. Sur la terre, les éruptions de roches supposent toujours l’existence antérieure de failles, c’est-à-dire de fentes mettant en communication l’intérieur du globe avec l’atmosphère. Ces failles se reconnaissent souvent au rejet qu’elles ont fait subir aux roches qui constituent leurs deux parois ; ces roches d’abord