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LA NATURE.

question des navires cuirassés. M. Dislère divise son sujet en deux parties distinctes ; dans l’une, historique et critique, l’auteur rappelle la succession des études et des travaux faits pour constituer soit en France, soit à l’étranger, les marines cuirassées, en même temps qu’il étudie les conditions principales auxquelles doivent actuellement satisfaire les navires d’escadre, les garde-côtes, etc., et la mesure dans laquelle y satisfont les types existants ; dans la seconde partie sont réunis, sous formes de tableaux, les chiffres permettant de se rendre un compte aussi exact que possible des principaux navires cuirassés ; cette étude a été faite pour 85 navires, en service ou en chantier.

Le but primitif de l’ouvrage était simplement d’exposer la situation actuelle de la marine cuirassée, en laissant au lecteur le soin de conclure ; mais, après une étude aussi complète, l’auteur s’est trouvé amené de lui-même à la nécessité d’émettre une opinion, et il n’a pas hésité à conclure en faveur du décuirassement de nos navires d’escadre, tout au moins en dehors d’une ceinture à la flottaison.

Nouveau traité de chimie industrielle, par R. Wagner, professeur de chimie à l’Université de Wurzbourg. — Édition française publiée d’après la huitième édition allemande, par le docteur L. Gautier. — 2 beaux vol. grand in-8o formant 1,386 pages, avec 406 figures dans le texte. — F. Savy, 24, rue Hautefeuille. Paris. — Prix : 20 francs.

Il n’est pas nécessaire d’insister sur l’importance des industries chimiques qui jouent aujourd’hui un rôle si considérable, et qui rendent chaque jour à la société moderne de nouveaux services par les innombrables conquêtes qu’on leur doit. Parmi les traités nombreux qui décrivent l’ensemble des industries chimiques, celui de M. Wagner était un des plus estimés, et des plus appréciés des chimistes. Nous ne saurions trop féliciter M. le docteur Gautier d’avoir publié une édition française de ce magnifique et utile ouvrage. Nous avons remarqué certains chapitres qui nous ont paru très-complets, très-clairement rédigés et remplis de détails que ne donnaient guère jusqu’ici les nombreux traités que nous connaissons.


ACADÉMIE DES SCIENCES
Séance du 17 novembre 1873. — Présidence de M. de Quatrefages.

M. Burdin. — La section de mécanique vient de perdre le doyen de ses correspondants, M. Burdin, ingénieur en chef des mines, mort à Clermont-Ferrand, dans sa quatre-vingt-sixième année, le 12 de ce mois. Le nom de M. Burdin est attaché à plusieurs grands progrès des sciences. C’est à lui qu’on doit la première turbine, dont l’invention ne lui a rapporté que de l’honneur, tandis que d’autres, plus heureux, grâce à certaines améliorations de détail, en ont tiré, en outre, de grands profits. Bien avant Poncelet et Coriolis, M. Burdin avait dans une quarantaine de pages remarquables déposé le germe de la théorie si féconde du travail. Enfin, il a l’antériorité sur M. Ericson, relativement à l’application de l’air chaud dans l’industrie : encore ici, comme pour les turbines, il n’a pas pu arriver à un résultat pratique, mais ses recherches n’en ont pas moins été de la plus haute utilité pour la solution définitive du problème.

Fabrication de la bière. — Pour beaucoup de personnes, l’événement de la séance a été la communication par M. Pasteur, d’un procédé de fabrication de la bière, par lequel ce liquide serait soustrait à toute chance d’altération. Ce procédé est fondé, comme celui du même auteur relatif au vin, sur la doctrine maintenant célèbre sous le nom de panspermie et d’après laquelle la décomposition et la putréfaction des substances organiques sont causées par des germes organisés arrivant par l’air. Nous n’entrons pas dans la description des méthodes indiquées par l’auteur, parce que nous ne pouvons être convaincus de l’exactitude de son point de départ. En effet, M. Pasteur pose en fait qu’une décoction de levure de bière, abandonnée dans un ballon ouvert, mais dont le col étiré a été contourné, peut subsister indéfiniment sans altération. Or, on nous a fait assister à des expériences faites rigoureusement suivant les indications de M. Pasteur, et dans lesquelles la levure devenait le siège de végétations abondantes. Celles-ci n’apparaissent d’ailleurs pas tout de suite ; il faut d’ordinaire plusieurs mois pour qu’elles prennent naissance, et quelquefois même plusieurs années ; mais leur possibilité met à néant le point de départ de M. Pasteur, et ruine par conséquent tout l’édifice qu’il construit sur cette base.

Un fer météorique. — Au nom de M. Lawrence Smith, professeur à l’université de Louisville (Kentucky), M. Dumas met sous les yeux de l’Académie une grande lame polie de fer météorique. Elle provient d’une masse volumineuse, découverte à Howord, dans l’Indiana, en creusant un fossé de 60 centimètres de profondeur. C’est un métal analogue à l’acier, et renfermant de gros rognons de ce sulfure particulier de fer et de nickel qu’on appelle troïlite. Ces rognons sont comme encadrés de phosphure, dit schreiberite. M. Smith, en terminant son mémoire, se livre à certaines considérations relatives à l’influence du phosphore sur la solubilité du fer, qui pourrait devenir peut-être le point de départ d’applications industrielles, mais qu’il faudrait, au préalable, soumettre à des études spéciales.

Le phylloxéra plus fort que les botanistes. — Pendant très-longtemps les botanistes ont confondu ensemble les végétaux, d’ailleurs fort voisins, qui constituent maintenant les genres vitis (vigne), ampelopsis (vigne-vierge) et cissus. Or, il résulte des recherches de M. Maxime Cornu que le phylloxéra, beaucoup plus avisé, ne commet pas la même confusion. Si on le place sur une vigne, quelle que soit son espèce, il s’y fixe et produit ses ravages, mais il respecte les ampelopsis et les cissus.

Dosage de l’ammoniaque dans l’air. — Déjà nous avons signalé un très-intéressant travail de M. Truchot, sur la proportion d’acide carbonique contenu dans l’air à différentes altitudes. Le même auteur a fait une étude analogue au sujet de l’ammoniaque. Il trouve que Clermont-Ferrand donnant, par mètre cube d’air, de 1 à 2 milligrammes d’ammoniaque, le sommet du Puy-de-Dôme en fournit 3 milligrammes, et le sommet du pic de Sancy 5,5. Le résultat reste le même, que le temps soit beau, ou couvert, ou pluvieux. C’est un résultat tout à fait imprévu et bien de nature à engager les chimistes à persévérer dans l’étude approfondie de l’atmosphère. Comme le fait remarquer M. Elie de Beaumont, les faits de cette nature montrent toute l’importance des observatoires établis dans les montagnes. Les résultats qu’ils fournissent constituent comme le cadre fixe où viendront se ranger les données procurées par les observatoires mobiles des aérostats.

Le maximum de densité de l’eau. — Un ingénieur très-distingué, M. Piarron de Mondésir, adresse une explication, toute mécanique, du phénomène connu sous le