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LA NATURE.

vant l’intensité de la lumière sous l’influence de laquelle elles se sont développées. L’aspect filamenteux est celui sous lequel elles se présentent le plus communément, mais elles revêtent aussi des formes qui, quoique élémentaires, s’éloignent de cette simplicité. Nous avons groupé dans notre gravure les moisissures les plus curieuses. À gauche, s’étalent des lichens crustacés et foliacés, surmontés de Pénicillium sur la tête desquels se développent des sporules. À droite, se trouvent quelques Aspergillus, avec leur sommet chargé de spores, comme une tête de palmier. On voit au milieu, sur le premier plan, des Actinothirium, des Arycia et de longs chapelets de globules, qui sont autant de membres épars du même sujet ; au second plan, des Spheronema, des Cucurbitaria, des Stillum, etc.

Les moisissures ou mieux les Fungoïdes microscopiques, occupent dans le monde végétal une large place par leurs effets. Doués de cette étonnante force de multiplication, ils détruisent les végétaux nécessaires à l’alimentation : la vigne est atteinte de l’oïdium, le blé de la nielle, la pomme de terre du pernospora. Ainsi une petite plante, inconnue de tous ceux qui n’ont jamais mis l’œil au microscope, cause des ravages dont l’étendue est en raison inverse de sa taille. Une vulgaire moisissure enlace de ses filaments une autre plante plus grande qu’elle, et finit par causer sa mort ; certaines maladies épidémiques n’ont d’autre cause que l’invasion d’un parasitisme interne. Insignifiants par eux-mêmes, puisque les Fungoïdes ne sont appréciables que sous les plus forts grossissements, ils se développent avec tant de rapidité, qu’ils occasionnent les plus terribles désordres dans l’économie.

Le microscope nous montre que la nature est inépuisable dans ses plus intimes créations. Il existe une innombrable population d’êtres organisés, de végétaux étranges qui captivent l’imagination, inspirent à l’âme des sentiments élevés et invitent l’intelligence à l’admiration des œuvres de la création.

J. Girard.

CHRONIQUE

Succédané de la quinine. — Un pharmacien de Manille, M. Gruppe, a exposé à Vienne un succédané de la quinine. Ce nouveau médicament est une substance amère hygroscopique, incristallisable, extraite de l’écorce d’une apocynée, l’Echites scholaris L., qui croît abondamment aux îles Philippines. Les naturels du pays l’emploient depuis longtemps comme fébrifuge, sous le nom de Dita. (Société Linnéenne.)

Les mines d’or de l’Alaska. — On lit dans le World de New-York du 22 septembre : « Le rendement que donne le gisement aurifère de la baie d’argent dans l’Alaska met en ce moment en grand émoi la population de Silka, capitale du territoire. Une lettre de cette ville, datée du 29 août, dit que ce jour-là on avait expédié à Portland dans l’Orégon 200 tonnes de roches quartzeuses contenant de l’or. Un grand nombre d’Indiens travaillaient à Silver-Bay à extraire le minerai et le préparer pour le transport. On a mis à découvert des spécimens recueillis à 23 pieds et que les essais ont démontré contenir pour une valeur allant jusqu’à 900 dollars à la tonne. Les propriétaires de la mine refusent de vendre le site au prix de 200 000 dollars.

Le même correspondant dit qu’une lettre écrite par un officier du gouvernement à Fort-Wrangel dans la partie méridionale du territoire annonce que « les mines les plus riches qui aient jamais été découvertes dans l’Alaska » ont été trouvées près du lac Deasse, et que par leur seul travail manuel, les vingt ou trente mineurs qui l’exploitent recueillent de 2 à 3 onces d’or par jour. L’Alaska est une longue presqu’île de l’Amérique russe, au N.-O. du continent, et à 1 000 kil. Sud du détroit de Behring ; elle se lie vers le sud aux îles Aléoutes. Cet archipel, découvert en 1741 par Behring, fait partie de l’Amérique du Nord et appartient à l’empire russe. L’Alaska est à 54° 35′ de latitude N. et à 165° 7′ de longitude O. Ses habitants se livrent à la chasse et à la pêche et font quelque commerce de pelleteries.

Sépulture de l’âge de pierre. — Un nouveau monument des temps préhistoriques vient d’être mis au jour dans les environs de Paris. Deux membres du comité archéologique de Senlis, MM. Millescamps et Hahn, fouillent en ce moment à Luzarches un véritable cimetière dont l’existence avait été révélée il y a une vingtaine d’années. Dans cette sépulture qui remonte à l’âge de la pierre polie a été trouvé un certain nombre d’instruments en silex taillés, tels que : un beau grattoir intact, des haches de diverses dimensions, des couteaux, des ciseaux, des pointes de flèches, une quantité de petites lames fines et minces, délicatement travaillées ; il y a aussi des perçoirs en os d’animaux différents ; enfin, sur les débris d’un squelette de femme, a été recueilli un ornement en pierre polie, percée de deux trous, qui a probablement servi d’amulette ou de pendant de collier. Quelques crânes et certains ossements ont attiré l’attention du docteur Broca, qui se propose d’en faire l’objet d’une communication à la Société d’anthropologie de Paris. Les dimensions et la disposition de la sépulture, le mobilier funéraire qui y a été déposé sont relevés avec soin par MM. Millescamps et Hahn, qui soumettront les résultats de leur découverte à l’examen des hommes compétents.

Nouvelles de Livingstone. — Une correspondance de Sierra-Leone, adressée à l’Irish-Times, rapporte que M. Cressey, passager du steamer Africa, reçut en remontant le fleuve du Congo, le 17 août, une lettre d’un de ses amis établi à 300 milles au-dessus de la rivière, l’informant qu’à 200 milles plus haut, un homme blanc, accompagné par un certain nombre de serviteurs indigènes, avait été vu se dirigeant vers la côte de l’Ouest. Se trouvant à court de vivres, il avait été détenu par une tribu qui le gardait prisonnier jusqu’à ce qu’il se fût ravitaillé. D’après la description faite de l’individu par les trafiquants indigènes à l’ami de M. Cressey, on a pensé que cet homme était le docteur Livingstone. Le frère du docteur Charles Livingstone, en apprenant cette nouvelle au vieux Calabar, croit lui-même que l’homme en question ne peut être autre que le célèbre et intrépide voyageur anglais. (Journal officiel.)

Le soleil et les colonies françaises. — Au dix-huitième siècle, les Espagnols disaient avec orgueil « que jamais le soleil ne se couchait sur leurs domaines. » Mais cet adage