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N° 17. — 27 SEPTEMBRE 1873.
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LA NATURE.

L’ÉCOLE ANDERSON
AUX ÎLES ÉLISABETH.

Au commencement de l’année 1873, l’île Penikese, une de celles qui font partie de l’archipel Élisabeth, à l’entrée de la baie Buzzard, appartenait à M. Anderson, riche négociant de New-York. M. Agassiz ayant manifesté, dans un de ses ouvrages, le désir d’établir quelque part sur les bords des États de la nouvelle Angleterre, une École d’histoire naturelle spécialement consacrée à l’étude des animaux marins, M. Anderson écrivit au grand ichthyologiste pour mettre à sa disposition la propriété de ce charmant domaine, dont la valeur était estimée à 2 500 000 francs. Ce généreux donateur, comme on en trouve si peu de ce côté de l’Atlantique, ajoutait à son présent, plus que princier, une somme de 1 250 000 francs en espèces pour construire l’École d’histoire naturelle, et il priait M. Agassiz de vouloir bien en être le fondateur.

L’École d’histoire naturelle Anderson, dirigée par M. Agassiz.

Agassiz, qui avait refusé la direction du Muséum d’histoire naturelle de Paris, proposée par Napoléon III, son ancien élève, répondit favorablement à une offre si inattendue, si honorable, tant pour l’homme généreux qui la faisait que pour le savant qui en était l’objet. Il mit cependant à son adhésion une condition formelle. Il exigea que l’ancien propriétaire de l’île Penikese conservât une maison de campagne dans une presqu’île qui en fait partie.

M. Anderson ayant souscrit volontiers à cette obligation, un acte en règle de donation fut rédigé et remis à M. Agassiz par M. Anderson en personne. C’est alors seulement que ces deux hommes, dont le nom ne sera point séparé dans l’histoire des sciences, se serrèrent la main pour la première fois, car jusqu’alors ils étaient parfaitement étrangers l’un à l’autre.

Aussitôt cette cérémonie essentielle accomplie, on se mit à l’œuvre pour construire les bâtiments destinés aux élèves, aux collections, aux laboratoires et aux professeurs.

Les constructions, terminées en temps utile pour que les cours de l’été 1873 aient commencé en juillet, sont simples et commodes ; elles sont assez vastes pour recevoir une cinquantaine d’élèves, nombre qui a été considéré comme largement suffisant. Elles se composent d’un édifice à un seul étage, dans le rez-de-chaussée duquel ont été placés les laboratoires et les amphithéâtres. Une aile a été réservée pour le logement du directeur et du corps enseignant.

C’est le 8 juillet, à midi, quatre jours après la célébration du quatre-vingt-dix-septième anniversaire de la déclaration d’indépendance, que l’École a été ouverte par le professeur Agassiz, en présence de M. Anderson, des élèves et de quelques notabilités scientifiques.

Par une coïncidence bizarre, c’était à peu près à la même époque que M. Agassiz, qui était depuis longtemps attaché à l’Académie des sciences de Paris, en qualité de simple correspondant, était nommé un des huit associés étrangers de cette illustre assemblée.

Agassiz a prononcé un discours que tous les journaux américains ont reproduit avec un empressement qui nous surprend peu de leur part, car l’il-

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