Page:La Nature, 1873.djvu/23

Cette page a été validée par deux contributeurs.
15
LA NATURE.

CHRONIQUE


Isthme de Panama. — La question du percement de l’isthme de Panama est reconnue de plus en plus insoluble, à cause des difficultés énormes que présentent les terrassements. En présence de cette situation insurmontable, un ingénieur, M. A. Sébillot, a proposé de faire franchir aux navires les pentes du terrain au moyen de bassins mobiles remplis d’eau dans lesquels on les ferait entrer, puis, tout en y restant à flot, le bassin ou dock, monté sur six rails, serait hâlé par un certain nombre de locomotives sur des pentes pas plus forte que celles que l’on rencontre dans la pratique de la construction des chemins de fer. Ce projet, basé sur des systèmes analogues établis aux États-Unis, assurerait une grande économie et plus de rapidité d’exécution.

Service météorologique aux États-Unis d’Amérique. — Le ministère de la guerre a organisé aux États-Unis un service météorologique pratique, analogue à ceux qui ont fonctionné pendant quelque temps en France et en Angleterre. Le ministère, ayant tous les jours le télégraphe à sa disposition pendant un temps déterminé, a profité de l’excédant accordé aux ordres à transmettre pour communiquer tous les jours des télégrammes de l’état atmosphérique à 74 stations, réparties sur les divers points des États-Unis. L’administration centrale compulse tous les matins les indications reçues, sur une carte-type et fournit des prévisions en conséquence. Elles comprennent : les courbes isobares, l’état du ciel figuré par des signes conventionnels, une notice sur la situation météorologique d’ensemble et les probabilités qui en sont la conséquence et les observations thermométriques.

Le kauri. — Les essences des forêts vierges de la Nouvelle-Zélande sont multipliées à l’infini et les colons anglais savent déjà bien en tirer parti pour la charpente et l’ébénisterie ; mais ce que l’on recherche avec une égale assiduité, c’est la gomme de kauri, sorte de produit végétal enfoui dans la terre. On suppose qu’à une époque reculée, de grandes étendues de bois ont été brûlées et que la gomme, qui est une sécrétion naturelle suintant entre l’écorce et le bois, s’est écoulée jusqu’aux premières racines où elle vient former un amas. La terre qui recouvre le dépôt aurait suffi pour le protéger de l’action du feu. Il existe encore cinq à six millions d’arbres qui produisent le kauri à la Nouvelle-Zélande.

Le jardin de Kew. — Un jardin botanique gagne beaucoup en intérêt lorsqu’il est accompagné de collections technologiques qui mettent en évidence tous les usages des végétaux. Cette union de la théorie avec la pratique est parfaitement réalisée au jardin de Kew, près de Londres. On a eu l’idée de transporter à Londres même les collections de ce riche muséum, mais l’opinion publique, si puissante en Angleterre, a protesté par des adresses couvertes de signatures, et rien ne sera modifié dans les installations de ce remarquable établissement.

Le puits glacé de Vermont. — Il existe à un mille de Brandon (Vermont), un puits qui a 15 mètres de profondeur, dont l’eau reste gelée pendant toute l’année. Le propriétaire commença à le creuser en 1859 ; après avoir traversé une couche d’argile, il arriva sur le gravier, où l’eau était abondante. Quand l’hiver vint, la glace se forma graduellement chaque nuit, suffisamment pour remplir le fond. Le puits fut abandonné ; ensuite, des spéculateurs croyant pouvoir tirer parti de cette anomalie, creusèrent dans les environs d’autres puits, pour rencontrer une couche de glace, mais ce ne fut qu’à la cinquième tentative qu’on obtint satisfaction. Les géologues émettent, entre autres commentaires, l’opinion que d’anciennes moraines de glaciers existeraient encore sous les couches d’argile, qui les auraient suffisamment protégées de la radiation solaire. On doit continuer les investigations.

Tremblements de terre sous-marins. — Il existe sous l’équateur, dans l’océan Atlantique, entre le 20° et le 50° de long. O., une région où, depuis près d’un siècle, les navigateurs mentionnent des tremblements de terre sous-marins ; de secousses non équivoques ont été observées à plusieurs reprises différentes. Récemment, le navire-école des États-Unis, Mercury, a fait des sondages et des dragages dans ces parages ; on a constaté la présence de sable volcanique, qui, vu au microscope, avait tout à fait l’apparence de celui que l’on rencontre auprès des volcans en activité.

Les arbres-bouteilles. — M. G. Bennet, de Sydney (Australie), a récemment signalé des arbres curieux ayant forme de bouteille, découverts dans la province de Queensland, dans des pâturages sur un sol sablonneux. Ils appartiennent à la famille des Sterculiacés et sont nommés par les botanistes australiens Delabechia rupestris. Les observateurs eurent occasion d’en voir un groupe de neuf, dont la hauteur avait environ de 10 à 20 mètres de haut ; la base, au tronc, qui a de 2 à 8 mètres de circonférence, est renflée, tandis que du sommet aminci il sort des branches disproportionnées par leur petitesse, par rapport au tronc de l’arbre. On remarque dans la structure interne une sorte de gomme mucilagineuse, dont certains pionniers font un usage alimentaire. On fait aussi des canots avec l’écorce.

Le coton aux îles Fidji. — La race anglo-saxonne, douée de cette aptitude naturelle à la colonisation, poursuit son œuvre dans toute l’Océanie, disputant pied à pied le terrain aux indigènes. La plantation du coton réussit bien aux îles Fidji ; commencée à l’époque de la guerre de sécession, elle se continue sous des auspices favorables. Le climat, le terrain et le mode de culture permettent d’obtenir des qualités en tout égales à celle si renommée de la Georgie. Depuis 1867, époque des premières expéditions pour l’Europe, les exportations ont quadruplé.

Chaleur maxima que peuvent supporter les poissons. — M. Lefèvre vient d’expérimenter sur des poissons rouges d’aquarium, en chauffant l’eau avec un thermosiphon, que les cyprins ne peuvent vivre dans un milieu dépassant environ 33°. Après avoir ouvert les clapets qui permettent la circulation de l’eau chaude, il trouva une température de 36° à la surface et de 31° au fond. Dix individus étaient morts sur 56 ; les survivants nageaient dans les couches d’eau inférieures, qui étaient plus fraîches. En laissant pendant quelque temps l’eau abandonnée à elle-même, pour juger de l’effet que produirait cet accroissement de la température, elle tomba à 28° à la surface et 22° au fond ; les poissons étaient très-vifs et venaient prendre leurs ébats à la partie supérieure, ce qu’ils évitaient précédemment avec soin.

Le poison des Pahouins, naturels du Gabon. — Deux savants physiologistes MM. Polaillon et Carville, ont pu se procurer par un voyageur émérite, M. Vincent, médecin de marine, des graines d’inée, plante remarquable et peu connue, dont le suc est employé par certaines tribus