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LA NATURE.

constitue la plus forte dépense, on s’est efforcé d’utiliser cette chaleur perdue. Tantôt on l’a employée pour échauffer l’air insufflé dans le haut fourneau ; tantôt on s’en est servi pour chauffer les chaudières qui font marcher la machine soufflante, ou bien pour faire subir au minerai un grillage préalable. Mais rien de tout cela n’a bien réussi. D’une façon ou de l’autre, on dérange l’allure du haut fourneau et on perd d’un côté ce que l’on gagne de l’autre.

La fonte que produit le haut-fourneau passe successivement dans d’autres foyers, feu de finerie et four à puddler où elle se transforme en fer malléable. Enfin on obtient l’acier, soit par le puddlage, en réduisant peu à peu des fontes de première qualité dans un foyer à flamme oxydante, soit par cémentation, en chauffant doucement le fer avec un mélange de charbon.

Fig. 2. — Appareil de Bessemer, pour la fabrication de l’acier.
Montrant l’ouverture pour l’introduction de la fonte en fusion et les tuyères en terre réfractaire.

Telles étaient, il y a quelque vingt ans, les méthodes métallurgiques en usage. On croyait alors avoir réalisé de grands progrès, notamment par la substitution du coke, comme combustible, au charbon de bois. Au lieu des forges catalanes de l’ancien temps qui donnaient 600 à 700 kilogrammes de fer par jour, on avait des hauts fourneaux gigantesques qui fournissaient 30 à 40 tonnes de fonte en vingt-quatre heures. Le prix du fer et de la fonte s’était beaucoup abaissé, mais l’acier avait encore une valeur vénale exorbitante ; aussi n’en consommait-on guère.

Fig. 3. — Appareil Siemens, pour la fabrication directe du fer et de l’acier.

L’acier puddlé ne se produisait qu’au moyen de fontes aciéreuses, provenant de certains minerais manganésifères que l’on ne trouve pas en tous pays.

Vers 1856, un ingénieur anglais, M. Bessemer, fit connaître un procédé nouveau qui devait être une révolution dans l’industrie de l’acier. M. Bessemer fait couler de la fonte dans une cornue de grande dimension, capable de recevoir jusqu’à 10 tonnes de métal, et préalablement chauffée au rouge. À travers la masse liquide, il insuffle des courants d’air à haute pression introduits par le bas de la cornue (fig. 2). L’oxygène décarbure la fonte et, dans un espace de vingt minutes, la réduit en acier de composition bien homogène. On est arrivé ainsi à fabriquer des rails d’acier à 320 francs les 1 000 kilogrammes, tandis que les rails en fer valent encore 180 francs.

Il a été dit plus haut que les gaz sortant par le gueulard des hauts fourneaux entraînent avec eux beaucoup de chaleur perdue et que l’on n’a pas réussi à employer utilement cette chaleur sans déranger l’allure de la fabrication. Le même fait se produit dans toutes les industries qui consomment une grande quantité de houille. Par exemple, toutes ces hautes cheminées de chaudières à vapeur que l’on voit dans les villes industrielles lancent dans l’atmosphère des gaz chauds qui représentent du charbon brûlé en pure perte.

M. Siemens a proposé d’y remédier au moyen de