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LA NATURE.

LA MÉTÉOROLOGIE DU MOIS DE JUIN

Dans les contrées de l’Afrique centrale que sir Samuel et lady Baker viennent, paraît-il, d’ouvrir d’une façon définitive à la civilisation européenne, les nègres s’imaginent que leurs chefs ont le pouvoir de donner de la pluie à la terre.

Quand les sécheresses se prolongent, ces sauvages se vengent de l’inclémence du ciel en mettant leurs princes à mort.

Pour bien faire comprendre l’embarras dans lequel doivent se trouver ces sorciers, comme du reste tous les prophètes du temps, nous avons mis sous les yeux de nos lecteurs deux courbes destinées à bien mettre en évidence les irrégularités dont les saisons sont susceptibles en un petit nombre d’années.

On voit que la maximum de température a varié, en une trentaine de jours, de 9 degrés ; s’élevant une fois jusqu’à 36°, et descendant une fois jusqu’à 28°.

L’époque à laquelle ce maximum a été constaté n’a pas offert de moins grandes irrégularités, car il a été observé une fois, au commencement de juin, et une autre fois à la fin d’août.

Trois mois et près de dix degrés, voilà de prodigieuses différences qui ne sont cependant que de simples épisodes dans notre histoire météorologique.

Cette année paraît devoir être féconde en orages d’un caractère tout particulier. Car rarement nous avons vu un phénomène plus majestueux que les deux orages observés à Paris, pendant la nuit, l’un vers le commencement, et l’autre vers la fin du mois dernier. Les coups de foudre éclataient avec une étonnante régularité, et les roulements du tonnerre se prolongeaient avec une sorte d’harmonie étrange.

C’est probablement la constitution orageuse du temps qui limite la quantité de chaleur, car le soleil est si ardent qu’il a suffi, en juin, d’un jour de beau temps pour arriver de prime saut à 32° de maximum.

C’est sur le versant autrichien et bavarois des Alpes que les grands orages ont éclaté. Leur apparition a été accompagnée, comme on le sait, d’un violent tremblement de terre. N’est-il pas permis de se demander s’il n’existe point de rapport entre les convulsions souterraines et l’arrivée inopinée des trombes se déchaînant avec une violence inouï et une rapidité fantastique ? Suivant les journaux allemands, la trombe de Troppau n’aurait pas mis une minute à éclater. Après une secousse aérienne comparable à une commotion de tremblement de terre, le soleil brillait de nouveau d’une façon admirable. Sans les ruines dont on était environné, les toits enlevés, les arbres brisés en spirale, on pouvait croire qu’il ne s’était rien passé que de très-ordinaire.

La tempête qui a éclaté à Vienne dans la même journée restera également célèbre dans les annales de la météorologie.

W. de Fonvielle



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