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qui recouvre de pareils tableaux, sans en gâter le coloris. Je me bornerai donc à conseiller à ceux de nos lecteurs qui sont arrivés jusqu’ici sans les connaître, d’être à l’avenir un peu plus soigneux de leurs plaisirs et de réparer bien vite ce péché d’omission.

Moi, qui conseille, je pourrais bien me trouver, avant peu, fort arriéré à mon tour, si je ne me hâtais de dire un mot des Souvenirs en Sicile, par M. le comte de Forbin[1]. À sa manière expéditive d’entreprendre et d’exécuter un grand voyage, et d’en faire lire bientôt après l’intéressant récit par toute la France, le critique qui veut suivre ses traces n’a pas de temps à perdre. Eh ! mon Dieu ! qu’êtes-vous donc devenu ? s’écriait un jour un des amis de M. de Forbin, en le rencontrant ; il y a près de six semaines qu’on ne vous voit plus nulle part ! Est-ce que, par hasard, vous seriez allé à la campagne ? — Oui, mon cher ami, j’arrive de Jérusalem. — Notre voyageur, cette fois-ci, a dirigé ses pas vers la Sicile. Ce penchant pour les courses lointaines, faites à l’impromptu, notre écrivain en trouve les raisons et l’excuse dans l’état actuel de la société. « Cet état est malheureusement hostile ; la vie devient chaque jour plus épineuse ; c’est un travail malaisé que de vivre au milieu des hommes : il est donc permis de considérer un voyage comme une trêve particulière conclue avec eux. Le départ endort les aversions ; le retour les trouve souvent distraites de leur ancienne poursuite, et, par un juste emploi de leur temps, dirigeant autant de nouvelles attaques. » Dans des temps ordinaires, ces réflexions sur l’agrément des voyages seraient peut-être justes ; mais de

  1. Un vol. in-80. Chez Delaunay, lib. au Palais-Royal (M. F.).