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C’est par eux que Clio corrige mes travers,
Élève mon courage au-dessus des revers,
Des demi-dieux mortels me lègue la mémoire,
Et me rend l’héritier de vingt siècles de gloire.

Pour prouver que M. Saintine, comme je l’ai dit plus haut, sait passer avec une grande flexibilité d’une poésie grave et sérieuse à un enjouement aimable toujours exprimé poétiquement, je citerai deux strophes charmantes de l’ode à la nymphe de Belleville :

Buveurs ! oui, c’est hors de la ville
Que Bacchus est père des ris.
Sous son nom et dans son asile.
Un imposteur règne à Paris.
Son front languissant se couronne
Et d’orcanette et de bryone ;
Au raisin il a dit adieu :
Et la naïade de la Seine,
À sa main unissant la sienne,
Rougit, complice du faux dieu.

Je crois qu’il est impossible d’exprimer avec plus de grâce, d’esprit et de conviction, cette triste vérité qu’on boit généralement d’assez mauvais vin dans la capitale du royaume de France.

Aux feux vacillans des bougies.
Heurtez vos coupes en chantant,
Vous que les nocturnes orgies
Rassemblent à Ménil-Montant.
Chantez, chantez ! demain peut-être.
Pour vous la coupe se tarit.
Est-on sûr du jour qui va naître,
Et de la vigne qui fleurit ?

On trouve souvent répandue, dans les poésies de M. Saintine, cette douce philosophie horatienne, qui fait aimer celui qui la professe. Aussi lorsqu’il lui