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gué parmi le petit nombre de ceux de nos jeunes poètes qui sont restés fidèles à la muse aimable des Gresset et des Chaulieu. Lorsqu’il se borne à l’épître ou à la poésie légère, placé dans la sphère qui convient à son talent, il s’y montre souvent avec éclat, presque toujours avec une grâce et un abandon plein de charmes. Son style alors a toute l’élégance et toute l’élévation qu’on peut désirer, sans jamais être déi paré par aucune affectation maniérée. Ses pensées sont justes, rendues quelquefois avec une heureuse précision, ou revêtues d’images brillantes qui les font vivement ressortir. Je voudrais pouvoir citer ici plusieurs passages de la renaissance des lettres et des arts sous François Ier, l’une des pièces les plus remarquables du recueil et qui méritait certainement la demi-couronne que l’Académie lui a décernée. Forcé de me restreindre, je mettrai du moins sous les yeux du lecteur ces beaux vers qui terminent le poëme sur le bonheur que procure l’étude :

Pour moi, qui, fatigué de nos longues querelles,
Séduit par les accords des doctes immortelles.
Ne demande qu’un luth, du silence et des fleurs ;
Lorsque dans ma retraite, oubliant nos malheurs,
J’entends, quoique abrité par mes dieux domestiques.
Gronder sur l’horizon les foudres politiques.
J’appelle à mon secours ces auteurs tant relus :
Je rêve le bonheur des jours qui ne sont plus ;
Je rajeunis la terre ; et, remontant les âges,
i5o J’évoque devant moi les héros et les sages.
De qui jadis le monde emprunta sa splendeur :
J’en reçois des leçons de vertu, de grandeur.
Plein des chantres divins de Grèce et d’Ausonie,
Je m’avance, éclairé des feux de leur génie ;