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Poëmes, Odes, Épîtres et Poésies diverses, par M. X.-B. Saintine. — Anatole, Léonie de Montbreuse, Laure d’Estell, romans, par Mme Sophie Gay. — Les Souvenirs de la Sicile, par M. le comte de Forbin.


Si ce n’est pas toujours la profusion et la diversité des mets qui font les repas agréables, si l’abondance entraîne souvent après elle le désordre et l’ennui, peut-être, en entreprenant de rendre compte à la fois de tous ces ouvrages intéressans et si divers entre eux, il m’est permis de m’effrayer un peu de ma tâche. Chez nos bons aïeux, le même brave jouvenceau qui se présentait fièrement dans la lice pour rompre une lance avec le plus formidable champion, se fût 10 montré bien timide s’il eût été chargé de faire les honneurs du tournoi, et de placer chacun selon son mérite et son rang. J’éprouve aujourd’hui un semblable embarras : assurément il n’est pas un des trois écrivains distingués qui doivent m’occuper tour à tour, auquel je n’eusse voulu consacrer toute la longueur d’un article ; mais le temps nous presse, l’attention du public est inconstante et mobile, de nouveaux ouvrages se succèdent chaque jour, et ceux d’hier, quelque remarquables qu’ils soient, seront déjà vieux demain. Le critique, de nos jours, ressemble à un voyageur qui, dans une traversée orageuse, est emporté par un courant, et n’a que le temps, à son grand regret, de jeter un coup d’œil rapide sur de beaux rivages qui s’enfuient.