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quels ne cherchent autre fruit que de regarder comment et pourquoi chaque chose se fait, et être spectateurs de la vie des autres hommes pour en juger et reigler la leur. »

La liste des collaborateurs, telle que la donne Émile Deschamps dans une note de ses dernières années, présente, au moins au premier aspect, une surprenante diversité : « La Muse française eut pour fondateurs : A. Soumet, A. Guiraud, ces deux poètes de transition entre le classique et le romantique, puis Victor Hugo, Alfred de Vigny, Saint-Valry, Desjardins, grand et original critique, mort presque aussitôt, et Emile Deschamps… À ces fondateurs se joignirent bien vite, comme collaborateurs sympathiques : Ch. Nodier, Jules Lefèvre, Belmontet, Pichald, Chênedollé, Saint-Prosper, Briffaut, Baour-Lormian, Ancelot, Gaspard de Pons, comte Théobald Wash, etc. et enfin Mesdames Sophie Gay, Delphine Gay, sa fille, Desbordes-Valmore, Amable Tastu, Hortense Céré-Barbé, Dufrénoy, etc… [1]» Il y a là des noms que l’on s’étonnerait de rencontrer ensemble, si l’on ne connaissait, en ces années de début, la confusion étrange des partis. C’est lentement que les romantiques sont arrivés à préciser leurs aspirations originales. L’école ne s’affirme pas par de belles manifestations d’audace, par des cris de révolte. Elle se

  1. I. Œuvres complètes, Paris, Lemerre, t. IV, p, 3o2. — Note écrite en réponse à une lettre d’A. de Latour : « … Vous me diriez comment elle naquit, cette Muse et par qui ? S’il faut la confondre avec le Cénacle, et si les poètes du recueil n’ont pas été plus tard les premiers à sortir du Cénacle ? Je sais bien que tout cela ne s’est fixé que plus tard, un peu après coup, et comme les origines de toutes les religions. Plus tard, les lueurs sont devenues des rayons. Tout s’est d’abord résumé en quelques noms propres. Mais ces noms, quels sont-ils au juste ? Nul n’en a gardé mieux que vous la mémoire. Vous êtes l’Ossian de la tribu. J’interroge pieusement les cordes de sa harpe. J’ai fait un pèlerinage à la grotte de Fingal. Est-ce que cela ne me donne pas un peu le droit d’interroger le dernier adepte poétique survivant du cycle ?… » (Lettre inédite.)