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devenait de plus en plus large, tumultueux, impraticable, et que le séjour dans la presqu’île n’était pas près de s’achever. Il passait ses journées à aller tirer quelques oiseaux, avec une vieille arbalète découverte dans un coin de la chaumière, et ce gibier augmentait fort à propos l’ordinaire de la maison. Ondine grondait bien un peu son ami de se montrer si cruel, de tuer ces aimables petites bêtes ; mais si, d’aventure, il revenait sans rien rapporter de sa chasse, elle le grondait encore plus fort, en disant qu’à cause de sa maladresse il allait falloir se contenter, pour tout mets, de poissons et d’écrevisses. Huldbrand supportait gaiement toutes ces petites attaques, d’autant qu’il les voyait le plus souvent finir par des caresses.

Le pêcheur et sa femme trouvaient naturelles ces familiarités ; ils en étaient venus insensiblement à considérer les deux jeunes gens comme des fiancés. Huldbrand lui-même se considérait comme le fiancé d’Ondine. Il lui semblait que sa vie s’écoulerait désormais en ce coin de terre perdu, séparé du restant de l’univers par un torrent infranchissable et par la plus redoutable des forêts ; que ce foyer était devenu le sien ; ces bons vieillards, ses parents d’adoption ; cette jeune fille, douce et aimante, sa fiancée.

Quelquefois, son cheval faisait entendre un hennissement particulier, comme pour lui rappeler qu’il avait d’autres exploits à accomplir. Ou bien, il semblait à Huldbrand que son blason brillait avec un éclat inaccou-