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— Ciel, pensa le jeune homme, la pauvre Ondine est donc dans la forêt, seule, parmi les spectres, et ce torrent met entre nous sa barrière infranchissable !…

S’armant de courage et de décision, Huldbrand tenta d’entrer dans le ruisseau pour le traverser soit à gué, soit à la nage. Toutes les visions qu’il avait eues dans la forêt l’assaillirent de nouveau : surtout l’image d’un grand vieillard blanc, qui ricanait en agitant avec ironie son énorme tête, lui apparut. Mais au-dessus de tout cela planait le souvenir attirant de la gracieuse Ondine, et Huldbrand ne recula pas.

Il allait, au contraire, bravement, luttant contre le courant rapide qui menaçait à tout instant de l’emporter, avec une forte branche de sapin sur laquelle il s’appuyait. Il avançait, avançait, quand tout à coup il entendit non loin de lui une voix charmante qui disait :

— Attention ! Méfie-toi du vieux torrent : il est plein de malice…

Il reconnut aisément la voix d’Ondine, s’arrêta, chercha d’où elle pouvait venir. Mais, étourdi par le bouillonnement de l’eau, il faillit perdre l’équilibre et tomber. Il se remit à marcher, murmurant :

— N’es-tu qu’un rêve, une illusion de beauté et de charme, Ondine ? Si tu ne vis pas réellement, je ne veux plus exister non plus : je veux devenir une ombre telle que toi, Ondine, chère Ondine…

— Fais attention !… Tourne-toi par ici, mon bel