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propre foyer. Je reviens de ma tournée, j’arrive, je trouve ma femme en pleurs, seule.

« — Où est notre enfant ? m’écriai-je. Qu’as-tu ?

« Les sanglots de ma femme l’étouffent, elle ne peut répondre que par des mots entrecoupés qui sont autant de blessures affreuses pour mon pauvre cœur. Un accident banal et terrible : l’enfant avec sa mère jouait au bord du lac ; soudain, la petite échappe aux mains qui la tiennent, se penche sur le miroir trompeur des eaux, tombe, disparaît…

« Nous avons longuement interrogé les rives du lac, cherché parmi les hautes herbes et jusqu’au fond de l’eau : en pure perte ; il ne nous a même pas été donné de revoir le cher visage de notre pauvre enfant.

« Je vous laisse à penser, seigneur chevalier, dans quel état de désolation nous laissa ce cruel événement. Nous étions, le même soir, assis, ma femme et moi, autour de la table familiale, tristes et sans force, suppliant la mort de ne pas nous épargner après un tel coup. Vivre encore, vivre sans notre cher ange, nous semblait impossible. Mais le ciel veillait ! Nous étions là à pleurer, à gémir, quand, tout à coup, par la porte ouverte entra une jolie petite fille de trois ou quatre ans environ, richement habillée, toute gracieuse et souriante. Nous la regardâmes avec émotion et surprise, sans savoir que penser. Quand elle fut tout près de moi, je vis que ses cheveux et ses vêtements ruisselaient d’eau.