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les roues de la voiture tournaient comme celles d’un moulin ; le charretier s’était installé sur le toit de la carriole.

— Ah ! çà, quel chemin prends-tu ? cria le chevalier. Ne vois-tu donc pas que tu nous conduis au beau milieu de la rivière ?

— Non pas, répondit l’homme en éclatant de rire ; c’est justement le contraire. Voyez vous-même : les eaux marchant sur nous, envahissant tout.

Et, en effet, la vallée tout entière disparaissait sous un flot montant ; les vagues s’agitaient en grondant.

— C’est encore ce misérable Kühleborn qui s’acharne contre nous ; il doit chercher à nous noyer. Mais tu sais probablement une formule contre ses maléfices ?

— Bien sûr que j’en sais une, mais je ne veux pas l’employer avant que vous ne sachiez mon nom.

— Le moment est mal choisi pour nous le faire connaître, ces flots montent sans cesse. Que m’importe ton nom !

— Il t’importe plus que tu ne le crois, chevalier. Je m’appelle Kühleborn.

Comme il achevait ces mots, la voiture soudain disparut, se changeant en un tourbillon d’écume, les chevaux s’évanouirent de même, tandis que le charretier se courbait et se fondait, à son tour, en une vague gigantesque qui s’abattit sur les deux voyageurs. Ceux-ci, d’un effort vigoureux, revinrent à la surface, cherchant à nager, mais