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trône, et voilà qu’on lui découvrait une origine si humble que son cœur frémissait d’indignation. Persuadée qu’Ondine avait inventé cette histoire ridicule pour l’humilier devant toute l’assemblée, elle se redressa, couvrant d’injures Ondine et les deux vieillards. La pauvre mère ainsi repoussée, ne put que balbutier :

— Hélas ! hélas ! comme son cœur est devenu méchant ! et pourtant, je le sens, c’est mon enfant !

Quant au pêcheur, il s’était jeté à genoux en suppliant le Seigneur que cette fille ne fût pas la sienne. Ondine, pâle et chancelante, considérait en silence cette scène pénible. Son beau rêve était brisé, sa joie faisait place à un immense désespoir. Enfin, elle se dirigea vers son amie en disant :

— N’as-tu donc pas d’âme, Bertalda ? N’as-tu pas d’âme ?

La pauvre enfant s’imaginait que cette question rendrait Bertalda à elle-même en la tirant de cet accès de fureur qui semblait une crise de folie. Mais la jeune fille, en proie à une rage terrible, l’invectivait de plus belle. Les convives commençaient à murmurer, les uns prenant son parti, les autres blâmant la dureté de son cœur. Au milieu du tumulte grandissant, la voix d’Ondine se fit entendre. La jeune femme réclama le droit de parler dans les appartements de son mari. Son noble maintien, sa dignité douloureuse en imposèrent aux invités. Un grand silence se fit.