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leurs pas. Les habitants de ces régions que Dieu dérobe aux regards indignes des hommes, sont tous d’un aspect gracieux et beau. Les femmes surtout, ondoyantes comme les vagues parmi lesquelles elles se jouent, surpassent en beauté les êtres les plus privilégiés ; leur visage a la pureté, leurs yeux la clarté du monde marin où elles vivent ; les pêcheurs qui, à l’aube, ont eu la bonne fortune de voir une de ces filles des eaux, au moment où, pour chanter, elle émergeait de la blanche écume, ne perdront jamais le souvenir de cette prodigieuse apparition. On appelle ces femmes les Ondines ; dois-je te dire, après cela, mon bien-aimé, que c’est une de ces Ondines que tu vois en ce moment devant toi ? »

Tandis qu’il écoutait l’étrange histoire de sa jeune épouse, Huldbrand cherchait à se persuader à lui-même qu’il n’y avait rien de vrai là-dedans, que ce n’était là, une fois de plus, qu’une mystification de la part de l’espiègle Ondine ; mais, en même temps, un vague pressentiment le portait à croire qu’Ondine était sincère, et alors, infiniment troublé, il regardait la conteuse sans savoir que répondre.

« Nous devrions préférer notre existence à celle des autres humains, reprit Ondine, car notre vie est plus harmonieuse que la vôtre ; mais un abîme nous sépare de vous. Tandis que notre corps a été exalté par le Créateur, nous avons été privés de la plus douce des fortunes : nous n’avons pas d’âme ! L’élément qui nous fait vivre nous