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DE LA VERTU DES PAY. II. PART.


eſt que les Chinois puiſſent paſſer pour les Sines des Anciens, ſelon que les uns & les autres nous ſont repréſentés comme les plus Orientaux de toute l’Aſie. Le Pere Trigaut eſt ſans doute celui, qui nous a fourni la plus belle Rélation, que nous aions de ce païs là, s’étant ſervi des écrits du Père Matthieu Ricius, dont le zéle, & le ſavoir ne peuvent être trop eſtimés. Et j’ai déjà remarqué dans la première partie de ce livre, comme ces Peres ont tenu pour aſſuré, que pluſieurs Chinois, aiant moralement bien vécu dans la ſimple obſervation du droit de Nature, ont pu faire leur ſalut éternel par une bonté & une aſſiſtance particuliere. de leur Créateur. La raifon, que rend le Pere Trigaut de ſon opinion, eſt, qu’entre toutes les Nations la leur eſt apparemment celle, qui s’eſt le mieux laiſſée conduire à la lumière naturelle, & qui a le moins erré au fait de la Religion. Car chacun ſait dé quels prodiges les Grecs, les Romains, & les Egyptiens remplirent autrefois leur culte divin. Les Chinois au contraire n’ont reconnu de tems immémorial qu’un ſeul Dieu, qu’ils nommaient le Roi du Ciel ; & l’on peut voir par leurs Annales de plus de quatre mille ans, qu’il n’y a point eu de Payens, qui l’aient moins offenſé