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DE LA VERTU DES PAYENS.


Saint Auguſtin ont témoigné qu’ils étoient de ce ſentiment ; & tous les Scholaſtiques modernes, qui n’ont pas deſeſperé du ſalut des Payens vertueux, ont été perſuadés de celui de Socrate, ce que Toſtat & quelques autres ont dit en terme exprès[1]. Mais entre tous · les Auteurs Catholiques qu’on peut alleguer en ſa faveur, il n’y en a point qui aient mis ſa vertu ſi haut que Marcile Ficin a fait. Il propoſe la vie de Socrate pour une image de la vie Chrétienne[2], & pour un original par fait, dont on doit s’efforcer d’être la copie. A la vérité, Saint Chryſoſtome écrivant contre ceux, qui ſe moquoient de la façon de vivre des Moines, avoit bien repréſenté Socrate comme un exemplaire de pauvreté Chrétienne ; mais il ne l’avoit pas donné pour un Tableau ſi achevé, ni ſi accompli, que Ficin le veut faire paſſer. Xenophon & Platon ont pris la peine de tracer de leur main ce beau portrait ; & longtems depuis Diogene Laerce en a tiré un craion après eux, qui ont été les premiers Peintres du monde pour bien faire la figure des Eſprits Le plus beau lineament, à mon gré, de toutileun ouvrage, eſt celui par lequel ils nous expriment la fin de Socrate, qui meurt conſtamment accuſé de s’être moqué de la pluralité

  1. Cap. 2. Geneſ & Ex. c. 30 qu. 14.
  2. l. 8. Ep.
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