connû ; force plus grande, ſe peut-on dire à ſoi-même,
que celle de s’abſtenir des voluptés qu’on n’a jamais
goûtées. D’ailleurs n’eſt-ce pas un agrément que
de trouver dans ſon partage la jouiſſance ſucceſſive
des biens du corps & des biens de l’ame ? Cela tente
plus d’accepter une condition, que ſi elle étoit privée
des plaiſirs de la jeuneſſe. Cependant ni ce côté-là,
ni tous les autres qui étoient ſi beaux ne firent point
ſouhaiter à cet Auteur la répétition de ſon rôle.
C’eſt une preuve qu’il s’y mêla des traverſes, que nous
ne connoiſſons pas, & qui faiſaient tomber la balance
du côté du mal. Il eſt vrai, qu’il avoit été marié,
mais il y avoit long tems, qu’il étoit veuf. Il eſt
bien apparent, que malgré les agrémens, qui paroiſſoient
au dehors, & ſur tout le plaiſir ſolide
d’avoir ce digne fils, dont nous avons parlé plus
haut, Mr. le Vayer n’en avoit pas moins ſes chagrins
particuliers qui peut être lui étoient d’autant
plus ſenſibles, qu’il ne s’en ouvroit à perſonne, en
qui il pût avoir une certaine confiance. Dans les
Cours tels Confidens ſont une marchandiſe rare.
Mais ce qui mit le comble à ſes déplaiſirs fut la
mort de ſon fils unique, que nous avons rapportée
plus haut, pour ne pas interrompre le fil de
nôtre diſcours. [Bayle.] « Il s’en affligea extrêmement, &
ſa douleur le démonta de telle ſorte, qu’il ſe remaria,
quoiqu’il eût plus de ſoiſſante & quinze
ans, & qu’il n’eut pas eu ſujet de pleurer ſa premiére
femme. »
Mais quoiqu’il avoue lui-même qu’il n’a eu à ſe plaindre d’aucune galanterie de ſa part, il ajoûte pourtant « que les incommodités, du mariage lui