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tez, & pour le quel tous les autres ſemblent avoir été faits. On le reconnoit à ſon délicieux & puiſſant empire : il interdit l’uſage de la parole, de la vüe, de l’oüie, de la penſée, qui fait place au ſentiment le plus vif : il anéantit l’ame, avec tous ſes ſens ; il ſuspend toutes les fonctions de notre économie, il tient, pour ainſi dire, les rênes de l’homme entier, au gré de ces joyes ſouveraines & reſpectables, de ce fécond ſilence de la nature, qu’aucun Mortel ne devroit troubler, ſans être écraſé par la foudre : telle eſt en un mot ſa puiſſance immortelle, que la Raiſon, cette vaine & fiere