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auront instruit les autres. Ils n'auront pû entendre un bruit nouveau, par exemple, éprouver de nouvelles sensations, être frappés de tous ces beaux objets divers qui forment le ravissant Spectacle de la Nature, sans se trouver dans le cas de ce Sourd de Chartres, dont Fontenelle nous a le premier donné l'Histoire, lorsqu'il entendit pour la première fois à quarante ans le bruit étonnant des cloches.

De là seroit-il absurde de croire que ces premiers Mortels essaièrent, à la manière de ce Sourd, ou à celle des Animaux & des Müets (autre Espece d'Animaux), d'exprimer leurs nouveaux sentimens, par des mouvemens dépendans de l'Economie de leur imagination, & conséquemment ensuite par des sons spontanés propres à chaque Animal; expression naturelle de leur surprise, de leur joie, de leurs transports, ou de leurs besoins? Car sans doute ceux que la Nature a doüés d'un sentiment plus exquis, ont eu aussi plus de facilité pour l'exprimer.

Voilà comme je conçois que