Page:La Mettrie - Œuvres philosophiques, éd. de Berlin, Tome troisième, 1796.djvu/99

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

je veux que vous surpassiez un peu la nature, mais ne l’excédez jamais : c’est à la tendresse à seconder le tempéramment, & à faire les derniers efforts. Qu’il seroit heureux de trouver une ressource imprévue, au moment même qu’on s’embrasse pour la dernière sois, & que les pleurs mutuels des deux amans, prenant divers cours, semblent être les garans de leur douleur & de leur fidélité, en même temps que la marque, & le terme de leurs plaisirs.

Vous voyez combien de moyens divers l’auteur de la nature a voulu employer, pour faire arriver les hommes, plus ou moins vite, au but pour lequel ils ont été faits, qui est de croître, & de multiplier ; loi qui a moins été donnée à l’homme, qu’elle n’est née avec lui, loi intime, aussi ancienne que le monde, penchant si naturel à nos cœurs, que toutes nos actions tendent uniquement à celle d’aimer, dont elles ne semblent être que des espèces de distractions nécessaires.

Vous voyez que la faim, la soif, le sommeil, l’imagination, tous les appétits, toutes les passions, tous les sens, tant internes qu’externes, & en un mot, tous les mouvemens de notre machine conduisent à l’amour, & de l’amour à la volupté, des êtres organisés pour être heureux, des êtres qui n’ont pas un seul point dans tous leur corps, qui ne soit sensible au plaisir ; comme